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Coup de coeur.
La politique occupe une place importante dans la vie de Maryam Madjidi. Puis la famille doit se résoudre à l’exil. A leur arrivée à Paris, Maryam refuse d’abord de parler le français qu’elle maîtrise pourtant rapidement, puis se décide finalement à faire l’extrême inverse, adoptant cette nouvelle langue jusqu’à faire une croix complète sur le persan. A son père, dépité, qui lui dit que ce sont ces racines auxquelles elle tourne le dos, elle répond : « Je ne suis pas un arbre, je n’ai pas de racines ». L’exil
de la vie de Maryam Madjidi. Avant que de naître, elle a failli périr. Sa mère, enceinte, pour ne pas tomber dans les griffes de gardiens de la révolution, saute par une fenêtre du second étage. Les deux seront sauves. Pas facile d’expliquer le communisme, le partage à une fillette qui ne veut pas se séparer de son petit monde. Elle les enterre comme ses parents enterrent les livres interdits (Marx, Makarebki, Che Guevara) A la faveur de sa thèse, elle réapprend le persan, se réapproprie la langue qui l’a vue naître. Ce sera sa troisième naissance et son premier retour en Iran. Mais toujours l’Iran m’appelle, voix en sourdine, présence derrière mon dos, il me tapote l’épaule pour me rappeler à lui. Par devoir, par culpabilité, par peur de ne plus revoir les vieux, par rituel, par amour peut-être aussi, je me sens poussée à y retourner régulièrement. Souvenirs éparpillés restitués dans cette autofiction éclatée, où elle raconte une vie, une famille dispersée par l’exil, mais toujours avec deux soutiens, le persan et sa grand-mère. « Je suis une guirlande de mots accrochée à un arbre qu’un enfant montre du doigt Retrouvez Zazy sur son blog Je m’aime moi non plus
« Marx et la poupée » est le récit autobiographique, universel, parcellaire et poétique de Maryam Madjidi de son enfance iranienne à sa vie « française ». Ce qui frappe d’abord, c’est la structure du livre ou son absence qui en est tout sauf une. En refusant de livrer un récit chronologique et linéaire, Maryam Madjidi prenait le risque de perdre un peu son lecteur entre les différentes étapes de son parcours initiatique. Mais c’est bien au contraire dans un kaléidoscope de souvenirs, de sensations, de tourments qu’elle nous entraîne, un patchwork d’aventures. Ce qui retient ensuite l’attention ce sont les incessants allers-retours entre le « Je » et le « Il » ou le « Elle ». Maryam Madjidi parle d’elle-même ou de ses proches aussi bien en usant du je que du il ou du elle. Cette hésitation, qui n’en est pas une à mon sens, joue sur deux ressors opposés mais pourtant complémentaires. D’une part, Maryam Madjidi se désincarne pour rendre son histoire universelle : elle n’est pas unique dans son parcours, d’autres ont vécu la même chose avant elle, mais en se référant à elle-même à travers le prisme du « elle », elle s’éloigne de sa propre histoire pour l’offrir au lecteur. D’autre part, elle cherche à s’approprier toutes les histoires passées, similaires à la sienne, pour les rendre toutes particulières. Maryam Madjidi oscille donc sans cesse entre universalité et particularité, avec un brio rare. A travers ce double traitement de la personnalité de ses personnages, Maryam Madjidi rend un peu (beaucoup) compte du dédoublement qui s’est opéré en elle : elle a oscillé toute sa vie entre ses racines iraniennes et la nécessaire coupure qu’elle a dû opérer lors de son arrivée en France. A travers une double langue, à travers une double culture, Maryam Madjidi n’est plus elle-même nulle part. A défaut de parvenir à faire la paix intérieure entre ses différentes « personnalités » (il n’est évidemment pas question ici de psychoses ou de dédoublement de personnalités !), le réfugié est un exilé permanent, un déraciné perpétuel. Dans cette recherche de soi-même, Maryam Madjidi sera secondée par la voix de sa grand-mère, restée en Iran. Les passages où Maryam Madjidi échange virtuellement dans des scènes où pourtant cette voix intérieure prend corps font partie des plus admirables du livre. Un très beau livre donc sur l’exil, la fuite, l’enfance, le déracinement, la mémoire, l’oubli et le souvenir, sur la construction d’une personne à travers diverses épreuves, sur la vie tout simplement avec quelque chose en plus de profondément humain, d’intrinsèquement assoiffé d’existence et de vie.
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Magnifique voix de l’exil
Voilà ! C’est pour tomber sur ce genre de divine surprise que je lis des livres ! Pour éprouver ce délicieux frisson à la découverte de pages pleines de grâce. Car c’est sans doute le terme qui convient le mieux pour qualifier ce premier roman d’une jeune auteure française d’origine iranienne. J’avais pourtant quelques craintes en l’ouvrant. Car sur le thème de l’exil provoqué par la révolution iranienne et la découverte de la langue et de la culture françaises qui en découlent, une certaine Abnousse Shalmani avait précédé Maryam Madjidi avec un époustouflant Khomeiny, Sade et moi, faisant ainsi de l’ombre à Negar Djavadi, qui s’aventurait à son tour sur les mêmes terres avec un Désorientale (ne cherchez pas de billet, je n’en avais pas écrit) qui, malgré le battage médiatique, ne m’avait pas franchement convaincue… Mais Maryam Madjidi possède une voix bien à elle. Elle nous propose un récit original, à la fois tendre et incisif, plein d’humour et de sensibilité, offrant un éclairage subtil sur le rapport ambivalent qu’un individu contraint de quitter son pays entretient avec ses racines et avec sa culture d’accueil, l’écartèlement entre un monde resté derrière lui et celui au sein duquel il essaie de se faire une place. Avec des mots qui frappent comme des coups de poing, elle dit la peur, atroce, qui habite les opposants au régime, qui n’ont d’autre choix que de fuir pour échapper à la torture et à la mort. Mais lisez plutôt son livre ! Car ce sont les mots, les très beaux mots qu’elle a choisis qui font le charme et la fraîcheur de ce puissant récit. Retrouvez Delphine sur son blogÂ
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Être ailleurs
« Je ne suis pas un arbre, je n’ai pas de racines. » Magnifique autobiographie dans laquelle Maryam Madjidi, née en Iran, raconte son enfance entre des parents militants qui organisent des réunions clandestines, une grand-mère refusant que sa première petite-fille serve à transporter des documents secrets dans ses couches et deux oncles en prison. Elle se souvient qu’elle doit donner ses jouets avant de partir en France : posséder est une vilaine chose lui disent ses parents. La petite fille pleure : ses jouets, elle veut les garder ! Elle se souvient. Elle se souvient. Elle se souvient encore. Alors, il faut partir. Partir, c’est se retrouver en pays inconnu, entendre des mots inconnus, sentir des odeurs inconnues. Être étranger, être d’ailleurs. Et petit à petit, alors qu’on s’habitue au nouveau pays, on devient de nulle part. On n’appartient plus au pays d’origine dont on oublie doucement la langue et l’on n’est toujours pas du pays où l’on vit. D’où venez-vous ? D’Iran. Ah, comme ça doit être beau, là bas, j’aimerais moi aussi avoir une double culture, quelle richesse ! Maryam reste muette : être d’ici et d’ailleurs, c’est être de nulle part, coupée en deux, arrachée et non vraiment replantée, étrangère partout. Perdre son identité. Paris : 15m². La mère attend. La petite fille voit la mère qui attend. Et puis, l’école, les autres : la petite fille ne joue pas. Elle n’a pas les mots pour cela. Elle est seule. Bien sûr, être d’ailleurs a des avantages : avec humour, Maryam raconte comment elle s’amuse et joue auprès des hommes de son charme oriental : « Je lui fais mes regards langoureux, je deviens aussi sensuelle que possible, je suis une toile de Delacroix. Je passe la main dans mes cheveux. Je renverse ma tête, dévoilant la chair souple et fraîche de mon cou. Si je pouvais je demanderais au serveur quelques coussins, voilages et riches tentures. » Mais dans ce livre, Maryam ne joue plus : elle se met à nu et raconte son histoire, l’histoire d’une femme libre et libérée : « Je vous le donne, ce masque, prenez-le, je le dépose dans vos mains. » Un très beau texte, sensible et original, mêlant prose des souvenirs, contes et poésies, multiples formes d’expression pour dire l’arrachement, la violence du départ, la coupure de l’exil, la difficulté de renaître ailleurs, dans un pays qui n’est pas le sien mais qui finira par être un lieu à soi, un lieu où être soi, enfin ! Superbe ! Retrouvez Luci-Lias sur son blog |
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