C’est dans l’émission « Le Masque et la Plume » du 28 septembre dernier que j’ai entendu parler de ce qu’avait entrepris Karl Ove Knausgaard : écrire sa vie au plus près du réel. Loin de toute autofiction, dans un mouvement de décorticage, dans un esprit proustien, et dans une volonté littéraire; non pas par le biais d’un travail de la langue mais par l’ampleur du dessein lui-même (six tomes annoncés, je crois). Ils discouraient du deuxième tome, « Un homme amoureux » (sur lequel je compte me précipiter), et les avis étaient partagés, pour le moins. Jérôme Garcin a attiré l’attention sur la pauvreté stylistique, ce que n’a pas dénié Patricia Martin mais ce qu’elle a ajouté a suffit pour me donner (sacrément) envie : devant l’épaisseur du livre, elle avait décidé d’en lire une centaine de pages seulement, histoire de se donner une idée; elle n’a pas pu s’en extraire avant d’avoir tout lu, et elle compte bien lire la suite. Pierre Assouline, dans un billet vachard mais plutôt bien troussé, insiste sur cet aspect hypnotique, selon lui le seul argument de ceux qui aiment. J’en fait complètement partie, d’abord intéressée puis très vite envoûtée. Ce n’est pas justice que de déclarer une absence de style, car sinon, comment expliquer l’incroyable fluidité ? C’est fascinant, et ce même si l’auteur « croit dire la vérité alors qu’il dit ce qu’il pense » (P. Assouline) (et c’est très juste, ça), le lecteur, lui, croit lire la vie de quelqu’un d’autre alors que son cerveau ne cesse d’établir des parallèles avec la sienne propre et n’en revient pas, tout simplement, que quelqu’un puisse, comme ça, tout déballer. Je ne sais pas si c’est bon, mais je sais que j’en veux encore.