Le roman commence sur Maurice et son fils Norman, qui rentrent de Pologne où Nechama, fille unique d’un fils unique, a refusé de les voir. Alors que Maurice (rescapé d’Auschwhitz) dirige le musée de l’Holocauste de Washington et Norman la Holocaust Connections, Inc. (il vend des labels), leur descendante est devenue nonne catholique et a fait voeu de silence. L’occasion de faire connaissance avec nos deux personnages principaux, que nous retrouvons alors très vite en visite à Auschwitz, tentant de décrocher un énième don/contrat juteux, où ils rencontrent un tas de loustics pas piqués des hannetons (absolument personne n’est sain d’esprit dans ce roman). Dans un final explosif au musée de Washington tous seront mélangés…
On est immédiatement plongé dans le ton du roman : chaque personnage est totalement barré, très souvent odieux ou en tout cas ne présente au lecteur que les pires aspects d’une personnalité déjà très caricaturale à la base. Mais c’est très réussi car sous la satire furieuse (c’est vraiment le terme) affleure quelque chose d’infiniment plus sensible. Ca fait feu de tout bois, ça pétarade dans tous les sens, dans une narration – en plus – très serrée (parfois un peu étouffante), mais pourtant des choses sont dites, et qui touchent. C’est clairement très drôle, choquant, étonnant, on se demande plusieurs fois ce qui a bien pu passer par la tête de l’auteure pour qu’elle choisisse cette forme entre toutes (car le fond est bien différend, évidemment), l’attaque bille en tête de tout et tout le monde, tous pourris, tous vendus, tous récupérateurs vénaux (toutes religions confondues) mais aussi beaucoup, au final, si dépourvus, si revenus de leurs illusions premières, si immensément tristes et fatigués et effrayés par un avenir dont ils ne seraient pas, ou plus, ou si peu, ou si mal. J’admire cette capacité qu’a Tova Reich de transformer colère/indignation/réflexion profonde en un roman vachard et mordeur (pire que mordant), ça change des leçons pompeuses ou dégoulinantes, et ça ne tue rien ni personne. Vive la satire !