Fantôme: Une enquête de l'inspecteur Harry Hole
Jo Nesbø

Traduit par Paul Dott
Folio
avril 2013
608 p.  9,10 €
ebook avec DRM 8,99 €
 
 
 
 La rédaction l'a lu

Jo Nesbo, le nouveau Stieg Larsson ?

Il faudra qu’un jour un psychologue s’interroge sur les relations complexes qu’entretiennent les auteurs de romans policiers scandinaves avec leur héros. Le Suédois Henning Mankell avec Kurt Wallander, comme l’islandais Arnaldur Indridason avec Elendur Sveinsson ou le Norvégien Jo Nesbo avec Harry Hole, se sont habitués à pousser les curseurs au maximum. A côté du quotidien qu’ils décrivent, celui de l’Américain Harry Bosch (Michael Connelly) ou du britannique Jack Caffery (Mo Hayder) est un chemin verdoyant bordé de roses. A la longue, la cohabitation peut alors s’avérer usante. Parfois jusqu’à la cassure…

Addiction à l’alcool, tentation pour les drogues, instabilité sentimentale chronique, l’existence de Harry Hole est d’autant plus chargée de handicaps que son pays natal semble ravagé par la déliquescence sociale. Sans doute le regard de son créateur noircit-il particulièrement la réalité. Mais sous ces latitudes, quel que soit l’auteur, les effets de la mondialisation virent au cauchemar sans fin. Comme si chaque polar venu du froid nourrissait la nostalgie d’un Eden perdu, sans la moindre note d’espoir.

Dans « Fantôme », neuvième enquête de la série, un Harry Hole mal cicatrisé de sa rencontre avec « Le Léopard » retrouve son Oslo natal pour tenter de se reconstruire. Viré de la police, il découvre une ville où les trafiquants semblent avoir rebattu les cartes. Mis sur la piste du meurtre de l’un d’eux, renouant au passage avec son ex (voir « Le Bonhomme de neige »), il met au jour un complot où trouvent leur compte la politique locale, la hiérarchie policière et un mystérieux truand russe sans visage, le fameux « Fantôme ».

Moins sanglante que la précédente, cette enquête n’en mène pas moins Harry Hole droit dans le mur. Trop seul et trop usé pour tout encaisser. La lumière qui l’anime vacille à mesure qu’il passe d’un salaud à un lâche, d’un traitre à un assassin. L’auteur fait d’Oslo une cousine de la Baltimore de « The Wire ». Corruption, racisme et drogue à tous les étages. Les chiffres de ventes  et l’intérêt que lui porte le cinéma lui donnent raison. La presse US a même fait de lui le nouveau Stieg Larsson… L’attente et la pression sont fortes. Jo Nesbo y répond en invoquant ses propres démons, quitte à sacrifier le personnage qui lui a valu la fidélité du public.

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nuit blanche

Non rencontre et suspense

Il arrive que des auteurs soient plus intéressants que leurs livres. Ou l’inverse, que des romans surpassent de beaucoup ceux qui les ont signés. Et puis, il y a aussi les écrivains qui détestent la promotion. On se demande pourquoi ils la font. La pression des agents et des éditeurs probablement. En ce qui concerne Jo Nesbo, comme c’était la première fois que je le rencontrais, difficile de savoir s’il est TOUJOURS désagréable, s’il était mal luné ce jour-là, ou si j’ai eu droit à un traitement de défaveur. Obsédé par ses mails, répondant par monosyllabes… Gallimard aurait mieux fait d’économiser le billet d’avion et l’hôtel, et Nesbo son temps! Mais s’il ne mérite pas le détour, son livre lui vaut vraiment la peine qu’on lui accorde quelques heures. C’est le neuvième volet des enquêtes de Harry Hole, son héros, mais c’est avec le 7ème roman, « Le bonhomme de neige » que les ventes se sont envolées, confirmant cette tendance nordique du polar qui séduit de plus en plus de lecteurs.

Harry Hole est un drôle de coco. Un peu sanguin, mais généreux, courageux voire même suicidaire, il a quitté la police après cette affaire du « Bonhomme de neige » justement, où sa compagne, Rakel, et le fils de celle-ci, Oleg, ont failli y laisser leur peau. Ils sont séparés, depuis, par des milliers de kilomètres: elle à Oslo, lui à Hong Kong. Mais lorsqu’il apprend qu’Oleg est emprisonné pour avoir tué un dealer, il saute dans le premier avion pour tenter de le libérer. Ce ne sera pas si simple, car Oleg semble mouillé jusqu’au cou dans un trafic de drogue, une nouvelle substance encore pire que tout ce qui existait jusqu’à présent, la fioline. Avec cette intrigue qui nous ballade dans les bas-fonds d’Oslo, Jo Nesbo signe un thriller d’une efficacité redoutable.

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