On rencontre Alfred (57 ans) et Sally (52 ans), mariés depuis plus de deux décennies, alors que leurs vacances anglaises sont interrompues par l’annonce du cambriolage de leur domicile. Ils rentrent à Vienne, et Alfred a du mal à encaisser le choc, tandis que Sally sacrifie ses deux mois d’été à la remise en état de leur maison saccagée. Ça les éloigne, évidemment, Sally qui n’a jamais été d’une fidélité scrupuleuse en profite pour vérifier avec le voisin si elle est toujours séduisante; Alfred, pendant ce temps, chouchoute ses varices en tenant assidûment son journal intime. En apparence – et c’est ce que les premières pages nous laissent croire -, ils sont un couple moyen de bourgeois hypocrites et on va s’ennuyer… Mais pas du tout. D’abord parce que le style est très particulier, véritablement allemand (enfin autrichien – je ne suis pas à même de faire une différence), à tel point que j’ai interrompu ma lecture pour identifier qui était le traducteur, au cas où ce serait involontaire; il n’en est rien (très exigeantes traductions à son actif). J’ai donc poursuivi en acceptant ce petit quelque chose d’abrupt, cet humour très froid dans les dialogues, et ces longs passages à la ponctuation singulière comme parfaitement désirés par l’auteur. Ensuite le roman parvient assez magnifiquement à nous embarquer en décortiquant ce lent mouvement de va-et-vient, cette oscillation des sentiments qui régissent tous rapports humains, à fortiori la conjugalité. Enfin, le passage entre Sally et ses élèves (elle est prof d’anglais en collège) soulève de très intéressantes notions qui sont très finement exposées (le chapitre 8). De plus en plus harponnée au fil de ma lecture, j’en ai terminé en regrettant très fort que ça s’arrête.