Lune pourpre
James Patterson

Archipel
avril 2015
350 p.
 
 
 
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La forme sans le fond

New-York. Un corps est retrouvé dans un manège de Central Park. Mais pas n’importe quel corps : celui d’une fille à papa, richissime, partie prenante dans l’équipe de campagne aux prochaines élections municipales de la candidate de l’opposition actuelle… On fait alors appel aux services de la brigade créée pour enquêter sur les crimes touchant les VIP de la ville, quand bien même ce cadavre est déjà le quatrième abandonné par le tueur, les trois précédents meurtres ayant été commis sur des personnes beaucoup plus ordinaires et populaires. Seul point commun des victimes : leur assassinat est accompagné d’une vidéo publiée sur Internet où elles avouent un crime pour lequel elles n’ont pas été poursuivies, commis en toute impunité.

Comme d’habitude dans un livre de Patterson, on oscille entre les deux versants du précipice : d’un côté le plaisir d’une intrigue menée tambour battant, sans répit, bref du vrai page turner et de l’autre le malaise de thématiques certes plus ou moins universelles mais toujours abordées par le prisme d’une Amérique conservative où la loi du talion est encore la loi au-dessus de la loi.

Il est ici question du laxisme ou de l’impuissance, vous pouvez l’appeler comme vous voulez cela ne change rien, du système judiciaire qui de compromis en compromis, de compromissions en compromissions, ne rend pas le service public que le peuple est en droit d’attendre : par lâcheté, par grandeur d’âme, par manque de moyen, des voyous, des crapules, des meurtriers, j’en passe et des meilleurs, restent impunis, tranquillement. Alors des policiers s’arrogent le droit de les punir, rendant une justice qui n’a plus rien d’humain dans la mesure où ils se posent en démiurges, fous, avides de justice alors qu’il ne s’agit que de vengeance, de meurtre,… parfois de manière plus brutale encore que le crime initial sensé être puni. L’auteur ne semble pas vraiment vouloir prendre position et ce n’est qu’au moment du final qu’il couche sa condamnation du principe du bout du stylo (ou des doigts s’il tape frénétiquement sur son clavier) un semblant de repentir de la part d’un des « serial judger », moins jusqu’au-boutiste que son acolyte, après toutefois que le parrain de la mafia locale mette son flingue dans l’engrenage, se faisant arrêter au passage, donnant une espèce de valeur morale aux actes précédemment commis par les policiers vengeurs, légitimant en quelque sorte leur « travail » qui aura tout de même servi à quelque chose de façon positive, condamnation presque forcée pour ne pas se faire taxer d’extrémisme.

Je ne reviens pas non plus sur la légitimité d’une police consacrée aux VIP… après tout, diraient les héros de Patterson, la justice étant à double vitesse, pourquoi pas la protection des citoyens !

En dehors de ces problèmes de fond, problèmes résidant plus sur le traitement des questions posées que sur le fait de poser de telles questions, que l’on ne peut totalement oublier et auxquels on ne peut (en tout cas pour ma part) adhérer, Patterson sait écrire un récit prenant, « haletant » (si, si) bref un thriller pur jus (sans trop d’à-côté gores tout de même, uniquement violents) avec ses doses de piège pour le lecteur qui se laisserait porter par le récit plus qu’il ne chercherait à découvrir le pot-aux-roses.

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