illustration Brigitte Lannaud Levy
C’est en 2005 que Odile Riot alors boulangère bio, décide de changer de vie et de se consacrer à sa passion pour la lecture en devenant libraire. Elle ouvre alors « Le bel aujourd’hui » avec sa sœur Monique, qui depuis est partie à la retraite. Elles ont donné ce joli nom à leur enseigne parce qu’elles trouvaient que ça sonnait bien. Par la suite elles ont découvert que c’était un vers de Stéphane Mallarmé. Dans la jolie commune, entre mer et rivière, de Tréguier en Côtes d’Armor, la librairie, qui est aussi un salon de thé, se situe tout près de la maison natale de Ernest Renan dans la plus vieille rue de la ville. Entourée de deux libraires, Odile Riot accueille régulièrement des auteurs, des peintres, des musiciens. Elle organise des lectures pour les enfants et reçoit le poète Yvon Le Men pour ses rencontres « Il fait un temps de poèmes ». Très chaleureuse, Odile Riot sait créer du lien entre les gens. Sa librairie est un passage incontournable de cette ville très touristique du Trégor.
Dans cette rentrée, quel est le roman français qui vous a particulièrement plu ?
Paradoxalement il s’agit du roman d’une Bulgare qui écrit en français et qui s’attache dans son style à préserver une sorte d’accent de sa langue natale. « Nous dînerons en français » d’Albena Dimitrova (Galaade Edition). C’est un livre qui ouvre sur le monde. Une histoire d’amour très singulière et ardente. Mais aussi une lecture qui nous éclaire sur les enjeux politiques du néo-libéralisme.
En littérature étrangère, quel est le livre qui vous a le plus enthousiasmée ?
Ici nous travaillons avec Sarah qui est américaine. Elle est particulièrement attentive aux traductions. Toutes les deux nous avons adoré « Neverhome » de Laird Hunt (Actes Sud). Ce regard de femme engagée sous l’identité d’un homme pendant la guerre de Sécession est admirable. C’est un livre dense et intense sur l’engagement. Il mériterait le prix Médicis étranger.
Votre coup de cœur en premier roman :
Alexandre Seurat « La maladroite » (Le Rouergue). Inspiré d’un fait divers sur la maltraitance infantile, ce livre ne peut que raisonner en nous. Il nous interpelle sur ce que l’on peut dire ou doit dire dans de telles circonstances.
Le livre que vous défendez depuis toujours avec ferveur :
C’est une trilogie norvégienne « Le livre de Dina » de Herbjørg Wassmo. Une immense fresque, d’une puissance imparable autour d’un personnage féminin tout aussi passionné que révolté. On conseille ces trois livres tout le temps pour le plus grand bonheur de nos lecteurs, qu’ils soient indistinctement hommes ou femmes.
Quel a été selon vous le grand livre de cet été 2015 ?
« Là où les rivières se séparent » de Mark Spragg (Gallmeister). Au cour du Wyoming, l’auteur nous raconte son enfance dans un ranch où il va se construire au contact de la nature, des fermiers, des animaux et comment il est devenu écrivain. Une autobiographie pleine de poésie.
Une brève de librairie
Dans la région il y a une attraction touristique célèbre dans le monde entier : la maison entre deux rochers de Plougrescant. C’est une petite demeure bretonne en pierre, enchâssée entre deux énormes blocs de granit et construite au bord du site du Gouffre face à la mer. Magnifique. La propriétaire des lieux qui se bat pour l’interdiction de la reproduction photographique de sa maison est un jour rentrée à la librairie. Là, elle découvre sur les tables, le dernier roman de Irène Frain « Sortie de rien » avec une reproduction de sa maison en couverture. De rage, elle achète le livre et le déchire brutalement sous nos yeux éberlués pour en arracher la photo, tout en hurlant « Ils n’ont pas le droit !!!! ». Une scène incroyable et mémorable.
Propos recueillis par Brigitte Lannaud Levy
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Le bel aujourd’hui
19 rue Ernest Renan
22220 Tréguier
02 96 92 20 24