C’est un premier roman drôlement bien ficelé. De ces textes que d’aucuns rangeraient promptement au rayon feel-good… mais si, vous savez bien, cet artifice commercial qui tente de vous faire croire que certains romans font plus de bien que d’autres. Pourquoi pas un argument contraire, de type « feel-bad » ? Réflexion que pourrait avoir l’un des protagonistes de cette fiction : le patron de presse Lacarrière qui ne sait plus trop à quel saint se vouer pour faire tourner son entreprise, trop préoccupé par son héritier, un fêtard peu consistant. Ledit patron est un jour entrepris par l’ambitieuse Sandrine Cordier qui a envie de quitter pôle-emploi (où elle excelle à traquer le chômeur fraudeur) pour une activité professionnelle beaucoup plus près des marmites ! Sandrine est mariée à Guillaume qui est devenu un pro de l’arnaque aux kiosques de presse par amour du « papier journal » ; forcément cet aspect là du roman touchera plus la génération d’avant internet, représentée haut-la-main par la fille de ce couple là, une geek de 12 ans évidemment surdouée du clavier. Un frère artiste dans l’âme et une grand-mère qui veut se lancer dans le marché du web-pornographique complètent cette charmante famille.
Autour d’eux gravitent des personnages comme on en croise dans le « roman social » ou les « films réalistes », les situations sont plausibles autant que drôles : des immigrés clandestins qui tentent de survivre dans leur foyer de travailleurs se lancent dans des concours culinaires qui font saliver, des agents immobiliers véreux se font piéger à coup de recettes ayurvédiques (…hélas non fournies en fin de livre !), un altermondialiste flotte dans une société où il peine à trouver sa place (entre mauvaise foi et coup de génie). Une ancienne tête de Langues O reconvertie en rédactrice d’une rubrique « courrier du cœur » fait aussi partie de cette flopée de personnages qui nous entraînent dans une lecture tourbillonnante. Ils sont tour à tour agaçants, attachants, à côté de la plaque ou dans une folle énergie créative (même si, pour certains, le mode d’expression et de réalisation ne semble pas tout à fait…moral). Une comédie à savourer sans modération.