Rencontre avec Joël Dicker
Joël Dicker se souviendra longtemps de l’année 2012. En janvier, il publie son premier roman, un événement dont il rêvait depuis longtemps. Six mois plus tard, il sort un second livre, « La vérité sur l’affaire Harry Québert ». Aujourd’hui, il squatte la première place des meilleures ventes, il a remporté le prix de l’Académie française et le Goncourt des lycéens. Je serais lui, j’achèterais un billet de loterie! -Alors, comment tout ça a débuté ? -Je suis né à Genève en 1985. Ma mère est libraire, mon père prof de français. Il y avait donc beaucoup de livres chez moi. Enfants, on était fous de Roald Dahl. Je m’ennuyais pas mal à l’école, et j’étais surtout très mauvais en français. Mon prof ne cessait de me répéter que j’étais son pire élève. Et lorsque je le croise aujourd’hui, il me dit, « je savais bien que tu deviendrais écrivain!!! » J’étais un lecteur avec des hauts et des bas, à la fois très exigeant et basique. J’ai souvent de la peine à entrer dans un livre, mais je lis vraiment de tout: des bios, des essais, des romans.` -Vous avez fait un petit crochet par le théâtre je crois. -Oui, à Paris, au cours Florent. Mais je me suis vite rendu compte que si j’aimais bien le théâtre, je ne l’aimais pas assez pour percer. Il faut soit être prêt à tout, soit renoncer. -Ensuite le droit, sans passion non plus semble-t-il. -Il fallait que je trouve des études sans français ni maths! Et comme là aussi je m’ennuyais, j’ai commencé à écrire. J’adore ça depuis longtemps. Enfant, j’avais même créé un petit journal, « La Gazette des animaux », un mensuel que je photocopiais. J’avais 300, 400 abandonnés. Je pense que ça a été ma première rencontre avec des lecteurs. -Bon, alors, comment êtes-vous devenu écrivain à succès ? -J’ai écrit une nouvelle, qui a remporté le prix international des jeunes auteurs. Elle a été publiée dans un recueil, et c’est la première fois qu’un de mes textes prenait vie. J’ai ensuite écrit quatre manuscrits, avant que le cinquième ne soit accepté (après plusieurs autres refus) par Vladimir Dimitrejevic, l’éditeur de l’Age d’Homme, en Suisse, en janvier 2011. En attendant qu’il soit publié, j’avais commencé un autre livre qui s’intitulait « Les origines du mal ». Je devais passer mon master en droit, je n’avais rien fichu à part écrire, je ne me suis pas présenté aux examens, et j’étais mal barré. -Pourquoi le situer en Amérique ? -J’ai passé de nombreuses vacances dans le Maine, où j’ai de la famille. J’ai commencé par dessiner une maison, puis l’idée s’est peu à peu affinée. Je voulais un roman, un maître et un élève et une jeune fille, Nola. Je suis incapable d’avoir un plan clair et je me suis embarqué. Il y a eu trente versions. Il fallait ensuite trouver le ton: comment écrire en français un livre qui se passe aux Etats-Unis. Il fallait que j’intègre les codes des écrivains américains. -Il y a encore six mois, vous étiez totalement inconnu. J’imagine que même dans vos rêves, vous ne pouviez imaginer ce qui se passerait ? -Je l’ai montré en mai 2012 à Bernard de Fallois (le co-éditeur de l’Age d’Homme). Enthousiaste, il a annulé ses vacances pour pouvoir le publier en septembre. J’ai pensé que j’allais me faire écraser, mais que j’étais au moins sûr d’une chose, que mon éditeur était fou du livre et que ce serait une belle aventure humaine. Il a transmis une espèce d’énergie positive aux libraires. Le premier tirage était de 20.000 exemplaires et vous connaissez la suite. « La Vérité sur l’affaire Harry Québert » (de Fallois) |
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