Le Goût du large
Nicolas Delesalle

Préludes
janvier 2016
320 p.  14,20 €
 
 
 
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Une formidable invitation au voyage et à l’ouverture sur le monde

Une parenthèse hors du temps, une pause dans l’éternelle course contre la montre, qui n’en a pas rêvé ? Certains ne se contentent pas de rêver, ils embarquent sur un cargo. Au milieu d’une mosaïque de containers. Loin du confort et de la foule policée des croisières de masse. Loin des sentiers balisés des voyages organisés. Sans autre distraction que le spectacle grandiose offert par la nature, l’immensité de la mer, les couleurs du ciel, le ballet des dauphins ou des baleines. Sans autre compagnie que celle d’un équipage de marins philippins aguerris à la solitude et à l’éloignement. Parfois celle d’un autre passager. On se côtoie sans se gêner, en respectant la bulle de l’autre. Pour le narrateur, le cargo s’appelle le MSC Cordoba, le port d’embarquement Anvers, la destination finale Istanbul et la passagère Maïté.

Neuf jours de navigation. Neuf jours de vagabondage pour un esprit enfin délivré des contingences quotidiennes. Neuf jours où les souvenirs remontent, inspirés par l’itinéraire du bateau. Souvenirs d’une vie de reporter de terrain entre conflits, débrouillardise, attente, danger et surtout rencontres improbables. Au fil de l’eau, les images prennent corps. De l’Afghanistan à l’Ukraine en passant par la Côte d’Ivoire, la Syrie ou la Sicile. Images de conflits modernes. Visages d’hommes et de femmes pris dans le chaos du changement, acteurs des révolutions pour les générations futures. Sur cette mer synonyme d’aventure et d’ailleurs, impossible de ne pas penser aux réfugiés qui jouent leur vie sur quelques kilomètres.

« Et puis je me suis miré dans le bleu hypnotisant de l’Atlantique. Regarder la mer pendant des heures est une activité mystique qui vous habille d’une robe de bure invisible. A la longue, l’océan se mue en écran sur lequel se projettent des images floues ».

C’est avec beaucoup de finesse et d’humanité que l’auteur nous emmène à sa suite, tous les sens en éveil. Les moments de repos contemplatif alternent avec les escapades dans sa mémoire, riches en événements et en anecdotes. D’où émergent des figures inoubliables.

Le voyage que propose Nicolas Delesalle n’est pas hors du temps, au contraire. Il offre un panorama du monde dans lequel nous vivons, témoignage vivant d’un observateur attentif et privilégié. Et raconte la seule chose finalement essentielle : au bout de chaque voyage, seuls comptent et restent les hommes. Une incitation aux rencontres, à l’ouverture sur le monde. A vivre ensemble, tout simplement.

Retrouvez Nicole G. sur son blog  

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