C’est bien connu les chats ont neuf vies.
C’est bien connu aussi, Soledad a beaucoup de talent.
A priori ces deux informations n’ont pas grand-chose à voir.
Et pourtant si. Figurez-vous que celle qui illustre avec humour les angoisses existentialo-futiles des lectrices de ELLE ou qui explique aux plus jeunes, avec tendresse, comment faire les bébés, s’est lancée dans un roman graphique ou plus précisément un conte graphique, dont le héros est un chat.
Tout est parti d’un fait divers réel : en Californie, Bart, un chat que l’on croyait mort, revient à la vie cinq jours après son enterrement. Soledad s’empare de cette résurrection et fait du miraculé un héros très colère, intelligent et méchant, qui tue et agresse tous ceux qu’il rencontre. Bart en a marre des humains et de sa vie de chat castré, entre croquettes, litière et ronrons. Il se rebelle et veut changer son existence ainsi que celle de ses congénères. Il organise la révolte avec succès et les chats se libèrent. Il poursuit ses rêves : devenir chanteur et parcourir le monde.
Et c’est là où les choses se gâtent. Bouilli en Chine, transformé en friandise au Vietnam, il « enchaîne les vies de merde » comme il dit, au point de regretter sa Floride natale, qu’il rejoindra pour sa neuvième vie, après mille péripéties, toutes plus funestes les unes que les autres. Et là, ô déception, il réalise que les chats sont rentrés dans le rang, et ont renoué avec leur train train quotidien, ce que lui-même d’ailleurs s’apprête à faire. Retour à la case départ, comme si rien, jamais, ne pouvait changer.
Une histoire triste, alors ? Oui, mais conduite avec une telle virtuosité et dessinée d’un trait si vif qu’il se dégage de ce beau livre une énergie insolente qui transforme ce conte grave en farce. Et ça, franchement, c’est vraiment fort.
