Les Putes voilées n'iront jamais au paradis
Chahdortt Djavann

Le Livre de Poche
avril 2016
216 p.  7,40 €
ebook avec DRM 12,99 €
 
 
 
 Les internautes l'ont lu
coup de coeur

Crier ma haine

Une grosse colère tripale m’est venue à la lecture de ce livre et n’a cessée depuis.
Une femme est retrouvée morte dans son tchador, c’est automatiquement une pute. Sauf l’ouvrier qui l’a trouvée et se demande s’il doit avertir la police, personne, ni femme, ni homme pour avoir une once d’humanité devant le cadavre de cette femme.
« Moi, j’ai entendu une fois un gardien dire qu’il faudrait exterminer toutes ces femmes qui répandent le mal et pervertissent les croyants
Moi, je dis qu’elle méritait ce qui lui est arrivé
Moi, je dis pas
Et tu dis quoi ? Il faut les laisser faire, ces putes ?
Non, il faut les sanctionner fermement
Rien n’arrête une pute. C’est vrai, on n’en peut plus de ces traînées
Nos fils sont pervertis
Et nos maris alors ?
Une femme qui va avec des hommes inconnus ne mérite pas mieux que ça.
J’espère que ça va servir de leçon aux autres
Il faut laisser son corps, comme un chien, pour que les autres traînées la voient.
C’est vrai quoi ! On n’ose pus marcher Danby la vie à cause de ces traînées…
Vous dites n’importe quoi. Il ne manquait plus que des assassins dans ce quartier !
Ce n’est pas un assassinat, c’est du nettoyage.
Enfin un homme qui a eu le courage de nous débarrasser d’une souillure !
En tout cas, c’est un croyant courageux. »
Que voici une bonne mise en appétit !
Oui, il y a un homme courageux, un bon croyant qui prend la peine de débarrasser l’Iran de ce fléau que sont les putes. Les a t-il exterminées avant ou après usage ??? J’opterais pour le numéro deux. De toute façon, ce n’est pas grave, le sang de ces femmes était sans valeur, des chiennes.

Zahra et Soudabeh deux amies d’enfance, belles comme le jour, ont, au départ des envies, des espoirs. Las ! Zahra est mariée à douze ans, impubère, à un homme peut-être plus âgé que son propre père, ce qui signifie plus d’école et plus d »avenir.
« Une fille si belle est un danger permanent, une tentation diabolique même pour ses propres frères ».
« Son époux avait dépucelé la gamine sans égard ni tendresse. Brutalement. Ce qui l’avait fait jouir puissamment. Préparer sa très jeune épouse avec des caresses et des baiser, l’exciter de sorte que son vagin fût humide et prêt à être pénétré était une vision avilissante et dégradante pour la sexualité virile des hommes de son milieu. On pénètre sa femme avec force, d’un coup, comme on enfonce une porte. Comme on viole. On pénètre sa femme vagin sec et fermé avant qu’elle n’écarte les cuisses comme une pute. »
Veuve à dix-sept ans, avec deux jeunes enfants, sans avoir connu l’insouciance de l’adolescence, et très naïve, elle sera mise sur le trottoir par un très bon ami de feu son mari. Elle n’est pas belle la vie !!!
Soudabeh, quant à elle, pour ne pas se trouver mariée à l’adolescence, et tout aussi naïve, à treize ans, fait une figue qui se termine… au bordel
« En tant que novice, c’est avec talent et obéissance que Soudabeh se soumit à la volonté de Dieu et débuta sa carrière de prostituée. Puisque Dieu en avait décidé ainsi, elle accomplirait de son mieux sa destinée. ».
Soudabeh devient pute de luxe. Ces macs ne cessent de lui rappeler d’où elle vient.
« N’oublie jamais dans quel taudis on t’a ramassée, ta chance est inespérée. »
N’est-il pas !

Chahdortt Djavann, entre fiction et réalité, vous donnez la parole à ces femmes qui se sont prostituées et qui, toutes, sont mortes parce qu’elles étaient putes. Elles sont cueillies par la misère, pour avoir fait confiance à la mauvaise personne, payer les drogues parentales et ou maritales, vendues, bonnes à tout faire, dans le plein sens de l’expression. Ces fillettes n’ont aucune éducation et lorsqu’à 17 ou 20 ans, elles sont veuves, répudiées, divorcées quel autre destin peuvent-elles avoir. De toute façon, la mort est au bout de leur chemin d’épines. Mouche sur le tas de fumier qui leur sert de vie, la mère, à sa naissance ne la déclare pas et se sert du certificat de naissance de l’aînée morte à quelques trois mois. Dès le début les dés sont pipés, une fille cela ne cause que des ennuis, alors, le plut tôt elle sera mariée, le mieux ce sera.
Les termes sont crus, durs. Elles parlent de cul, de bite, de branlette, de violence, de sueur, de saleté, de viol, jamais de l’amour, elle ne l’on jamais connu. Ces termes n’évoquent que la violence
« Une femme de ce pays, même une pute, se déplace sans faire de bruit. A travers le tchador noir, les clients ne voient ni jambes, ni seins, ni peau, ni boucles de cheveux, ni chute de reins… Les hommes visent directement le trou où tremper leur bite, c’est tout. »
Shahnaz assume son métier, elle aime le sexe, c’est presque l’exception qui confirme la règle, mais sa fin fut commune aux autres femmes.
« Je préfère la bite et le sperme à l’urine et les excréments, et même parfois, outre le pognon, je prends mon pied avec vos pères, vos frères et vos maris ».
Elle dit aussi
« Ce n’est pas pour rien que, dès que les extrémistes islamistes s’emparent du pouvoir, ils s’en prennent tout de suite au plaisir en général et au plaisir sexuel en particulier… Pour eux, la sexualité des femmes est diabolique. Ils ne supportent pas l’idée que leur mère ait écartée les jambes pour les fabriquer. »

Ces mollahs, ces hommes vertueux, religieux, obéissants…. Sont issus du ventre de leur mère. Est-ce pour cela qu’ils ne veulent pas écouter ni voir le plaisir d’une femme ? parce que la jouissance, possible, de leur génitrice la rabaisserait ? Touche pas à ma mère, mais je viole ta sœur qui est seule dans la rue ou je l’épouse pas encore nubile.
Epouser une gamine de huit, dix ans, pour moi, c’est de la pédophilie. Tout comme ces contrats de mariage temporaire s’apparentent à du proxénétisme. Une fois le contrat terminé, la jeune femme ne sera plus vierge et, finira au bordel ou dans la rue. Quelle belle morale vous nous donnez-là, messieurs les mollahs !

Malheureusement, cela ne se passe pas qu’en Iran. La pauvreté engendre cette vie sans espoir, J’ai l’impression d’enfoncer des portes ouvertes. En France, je ne crois pas que les femmes venues chercher une vie un peu meilleure et qui se retrouvent sur le trottoir sans papiers, sous les ordres d’un mac, d’une mafia, soient plus heureuses. Laissons venir à la tête du pays, des ultras et….

Que de conneries sont faites et dites au nom de la religion… Toujours au détriment de la femme. C’est à elle de se cacher, de s’enfouir sous un tchador, pas à l’homme de se maîtriser. Je me demande si la religion qui interdit tout n’est pas la raison de cela, le serpent se mord la queue (pardon pour l’image).

Pour ceux que la longueur de ma chronique rebute, sachez que c’est un livre-document à lire absolument
http://zazymut.over-blog.com/

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coup de coeur

Mes Soeurs, j’ai mal !

Dernier roman paru de cette auteure d’origine iranienne et dont j’ai déjà chroniqué « Bas les voiles » « La muette » et « Comment peut-on être français ». Ce roman d’une écriture extrêmement puissante ressuscite les voix de jeunes prostituées assassinées, dans l’indifférence générale, au nom de l’islam. Chahdortt Djavann s’est basée sur des faits réels : un père de famille a étranglé avec leur tchador 14 prostituées dont on a retrouvé les corps dans le caniveau. Son mobile : purifier les rues de sa ville. Dilemme des mollahs : condamner un musulman qui accomplit son devoir et élimine la Fessad (les dépravées) serait-il contraire à la charia ou bien ne pas le condamner encouragerait il quiconque à se prendre pour un mollah, à s’arroger le droit de déterminer quel sang est sans valeur. Le sang sans valeur étant celui des prostituées bien entendu. L’auteure, avec un grand courage, dénonce la tartuferie de la société : « La prostitution n’a jamais été aussi répandue dans le pays à cause de la pauvreté de l’immense majorité de la population, du trafic de la drogue, en particulier l’opium et l’héroïne. Dans les milieux pauvres, les filles, les soeurs, les épouses, les mères se vendent pour payer la dose de leurs pères, frères, maris, fils, quand ce n’est pas pour les nourrir ou pour payer la leur. Les multiples sanctions économiques internationales, la mauvaise gestion gouvernementale, les sommes exorbitantes dépensées pour soutenir, depuis des décennies, Hezbollah, Djihad islamique, Hamas, Frères musulmans… ont entraîné une inflation vertigineuse et la pénurie de tous les produits, y compris alimentaires. » Elle dénonce aussi les maltraitances psychologiques et le harcèlement que les femmes subissent dans ce pays. Il est impossible à une femme de circuler seule dans une rue sans qu’elle soit importunée, suivie, voire agressée par un homme. Elle met également l’accent sur la misère et l’énorme frustration sexuelles qui régnent dans le pays : « C’est la religion qui inculque la haine du corps, du plaisir sexuel, l’idée du péché. Pourquoi jouir serait-il un péché ? Pourquoi le sexe serait-il sale?… Tout ça à cause des conneries religieuses. Leur morale, qu’ils se la foutent au cul, les mollahs.Un homme a des besoins, ils n’ont que ça à la bouche; alors que les femmes ont plus de besoins sexuels que les hommes. Et les hommes le savent, et c’est pour ça qu’ils répriment et oppriment les femmes depuis la nuit des temps. Ils sont plus forts physiquement, mais sexuellement ils n’arrivent pas à la cheville des femmes. » Les mollahs qui font signer à des clients de prostituées des sigheh (contrats de mariages temporaires pour que tout soit en règle vis à vis de la religion) ne sont-ils pas tout simplement des proxénètes ? Par ailleurs, la pédophilie n’est pas un crime et il n’est pas rare que des petites filles soient mariées à 7, 8 ans à un homme beaucoup plus âgé qui abusera d’elles. La colère montait en moi au fur et à mesure de ma lecture. Les femmes n’ont-elles aucune valeur ? Ces hypocrites ne sont-ils pas tous sortis d’un vagin ? Zahra, Soudabeh, Hava…, mes soeurs, j’ai mal. Mal pour toutes ces femmes, ces jeunes filles, ces petites filles qui ne sont réduites qu’à être un trou. Même pas un objet sexuel. Juste un trou que les hommes sont obsédés à vouloir pénétrer.

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