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nuit blanche
Un moment aérien
« Avant de connaître la dame du dessous et le monsieur du dessus, la vieillesse ne m’intéressait pas. Vieux, mes parents n’ont pas eu le temps de le devenir, mon père s’est tué bien trop tôt et ma mère est retombée en enfance. Je ne vois jamais mes grands-parents, et c’est une jeune femme qui prend soin de ma mère. Quoi qu’il en soit, il est clair qu’aucun vieux n’aurait pu exciter mon imagination. Aucun, excepté la dame du dessous et le monsieur du dessus. Désormais, la vieillesse ne m’apparaît plus comme une ombre mais comme un éclat de lumière, le dernier, peut-être. » Ainsi débute le livre Alice, étudiante peu pressée, écrivaine en devenir habite un immeuble de Cagliari où vit, à l’étage du dessus, monsieur Johnson, violoniste américain, qui a toujours des chaussures aux lacets défaits et des vêtements improbables. Anna sensuelle, fantasque, cœur d’artichaut et sa fille jalouse au possible vivent en-dessous à l’entresol dans un petit appartement jamais éclairé par la lumière du jour, faute à l’escalier. Pour vivre, Anna fait des ménages, alors qu’elle devrait ne plus travailler car elle souffre d’une coronaropathie tritronculaire. Par l’entremise, non pas de ma tante Artémise, mais d’Alice, Anna va faire le ménage chez le monsieur du dessus, puis, finira par déposer sa valise chez le violoniste qui cache des revues un brin pornographiques dans un étui à violon. Arrivée de Johnson junior qui a fait un bébé tout seul, retour de la femme du monsieur, une richissime sarde un brin précieuse. Ça monte, ça descend, ça s’installe, bref, l’escalier bruisse de vie. Alice, telle une Aurélie Poulain, esseulée, depuis le suicide de son père et la folie de sa mère, tombe amoureuse du fils du monsieur du dessus qui la stimule à écrire, d’ailleurs, il l’a surnommée Gribouille. Je me suis installée devant une pièce de théâtre. Les portes ne claquent pas, quoique, avec la volcanique Anna, cela peut arriver, mais laissent échapper des instantanés de vie sarde. Cagliari en décor de fond, comme la Sardaigne, déjà décor de livres précédents Un moment aérien. Ce livre aurait pu être mièvre, dolent, mais… Milena Agus y met beaucoup d’humour, d’amour, de chaleur humaine, de désordre, de la loufoquerie qui sied à sa comédia. « Le violon. Ah ! Le violon ! commence Anna. Vous en entendez seulement quelques notes, à cause du bruit, mais en haut ! Ah ! En haut ! Vous n’allez pas me croire : je n’ai même pas l’impression de travailler. L’âme ‘envole, grâce à la musique. » Ce sont les mots, l’accent de Milena Agus qui m’ont fait m’envoler vers un pays merveilleux où la poésie, le rire, un brin de folie La première image qui me vient en fermant ce livre c’est un ballet. Oui, un ballet léger qu’un coup de balais n’a pas suffit à chasser, qu’un courant d’air suffit à faire danser. |
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