J'y suis presque
Nuala O'Faolain

traduit de l'anglais par Stéphane Camille
SW poche
sw poche
novembre 2016
256 p.  7,50 €
 
 
 
 La rédaction l'a lu

J’y suis presque

Se plonger dans un livre de Nuala O’Faolain ne relève pas de la simple promenade littéraire. Impossible de garder le cœur froid et les yeux secs par rapport à son texte et ne pas se sentir concerné par sa vie. Son histoire vous implique, vous entame, vous interpelle et vous pousse à reconsidérer votre propre existence.

« J’y suis presque » n’est pas un roman, pas tout à fait un document non plus, pas vraiment un recueil de souvenirs, mais plutôt une magnifique digression sur l’amour, le chagrin, la solitude et la difficulté de vivre en Irlande lorsqu’on est une femme.

Un cri de protestation

Cela ressemble aussi à un « cri de protestation » et à « une tentative de comprendre pourquoi sa vie semble n’avoir abouti à rien malgré de grandes promesses. » L’explication, Nuala O’Faolain l’a trouvée bien sûr, dans son enfance, dans le cœur de cette petite fille perdue au milieu d’une fratrie de neuf gosses livrés à eux-mêmes pendant que le père, chroniqueur mondain, courait les cocktails et les maîtresses et que sa mère noyait ses désillusions dans les bars. De cette première souffrance, elle ne se remettra jamais. Même après avoir connu le succès et l’amour de toute une population prise d’empathie pour son désespoir et de ferveur pour ses livres, elle est restée hantée par sa mère. Comme l’ont été d’ailleurs plusieurs de ses frères et sœurs. Seuls sont s’en sortis ceux qui ont choisi la voie traditionnelle famille-religion.

L’incroyable aventure éditoriale

Nuala, de son côté, a préféré les chemins de traverse. Après avoir noyé son mal-être dans l’alcool, enchaîné les liaisons malheureuses et les dépressions, il lui arrivé quelque chose de miraculeux, alors qu’elle approchait la soixantaine. Journaliste à l’ « Irish Times », elle tenait une chronique très lue dans son pays. Un petit éditeur lui proposa de réunir ces billets d’humeur en recueil. Elle accepta à condition de pouvoir y ajouter une préface… qui devint un récit de trois-cents pages, « On s’est déjà vu quelque part ? » Une interview à la télévision suffit ensuite à la transformer en phénomène. Le lendemain, l’Irlande entière plébiscitait Nuala. C’est tout cela et ce qui lui est arrivé ensuite qu’elle raconte dans ce livre où l’on retrouve tout ce qu’on a toujours aimé chez elle : une sensibilité à fleur de peau, une écriture formidablement vivante, une espèce de franchise désarmante, et puisque nous avons l’impression que c’est à chacun de nous qu’elle s’adresse, une incroyable capacité à susciter notre compassion. « J’ai tenté de refermer mes blessures en les mettant en mots, puis en purgeant les mots de leur pouvoir – en les considérant comme des outils pour un travail, une tâche », écrit-elle. Ces blessures ont fini par avoir raison d’elle. Aujourd’hui, Nuala nous manque beaucoup.

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 Les internautes l'ont lu
coup de coeur

Je suis tombée par hasard sur ce livre, publié il y a 10 ans aux Editions 10-18 et je l’ai acheté tout de suite car c’est le seul de Nuala O’Faolain que je n’avais pas encore lu.

« J’y suis presque » n’est pas un roman mais un bouleversant témoignage de l’auteure sur sa vie professionnelle et surtout personnelle. Nuala O’Faolain se livre sans fards à ses lecteurs mais elle a eu la délicatesse auparavant de demander leurs avis et leurs avals à ses 8 frères et soeurs.

» Quand un frère ou une soeur lit des Mémoires, le matériau est un no man’s land, à la fois trop proche et trop distant. Je pense que ce doit être comme de lire des lettres qu’on a soi-même écrites ; même si on les a écrites il y a peu de temps, on dirait déjà qu’elles ont été rédigées par quelqu’un de presque étranger. »

Si le succès de « On s’est déjà vu quelque part » lui a apporté l’indépendance et l’aisance financière, cela n’a pas apaisé ses tourments alors qu’elle abordait la cinquantaine, ni comblé sa solitude : « Il y avait des gens, dehors, qui m’aimaient ou qui auraient pu m’aimer ou qui en tout cas m’avaient dans leurs pensées. Mais j’étais résolue à ne pas laisser entrer l’amour. Ou à ne pas coopérer avec les actions de l’amour. Si mon coeur devait être touché, alors ce devait être de telle manière que je n’aie pas à lever le petit doigt. »

Et pourtant, elle rencontrera l’Amour à nouveau, provoquant elle-même la rencontre qui allait déboucher sur une belle histoire. Toutefois, la petite fille ( profondément blessée et marquée par le comportement de sa mère alcoolique) qui sommeille en elle fera tout pour parasiter cette relation et compromettre la suite. Nuala O’Faolain est là particulièrement touchante. Elle est décédée d’un cancer en 2008.

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