Bernard Minier, l’as du suspense - onlalu
   
 
 
 
 
 
Bernard MINIER
Nuit
Pocket
février 2017
608 p.  8,40 €
 
 
 

Bernard Minier, l’as du suspense

 

Après avoir esquissé un pas de côté le temps d’une « Putain d’histoire », Bernard Minier renoue avec son couple infernal, Servaz-Hirtmann, né dans « Glacé » en 2011. Le premier est policier, le deuxième un tueur de la pire espèce, fou, intelligent, pervers, grand amateur de Mahler, et dans ce jeu du chat et de la souris qu’ils poursuivent sans relâche, on ignore qui va se faire croquer par l’autre. Ce que je sais en revanche, c’est que vous allez plonger dans cette « Nuit » plus sombre que jamais, sans aucune envie de vous réveiller. Bernard Minier est vraiment un as du suspense !

Vous avez publié votre premier roman à cinquante ans. Pourquoi cette vocation tardive ?
J’ai eu envie de raconter des histoires, enfant, lorsque notre maîtresse d’école nous lisait Robinson Crusoe. Je me suis dit, voilà ce que je veux faire plus tard. J’ai commencé à écrire et à chaque étape de ma vie, je plagiais ce que je lisais : Bob Morane vers neuf ans, de la SF à l’adolescence, Nabokov et Thomas Bernhard à vingt ans ! J’ai même envoyé un texte à Gallimard, où l’on m’a répondu une lettre personnelle m’encourageant à privilégier la lecture de la littérature française : à l’époque, j’étais dans ma période Henry Miller ! J’aurais aimé suivre des études littéraires, mais mon père m’a poussé vers une autre voie. J’ai d’abord fait un an de médecine, option boîtes de nuit ! Puis je suis entré dans l’administration des douanes, ce qui me laissait du temps pour écrire. Je participais à des concours de nouvelles. Je suis venu au polar assez tard, et ma première tentative sérieuse, « Glacé » est née après avoir vu un reportage sur une usine hydroélectrique au sommet d’une montagne. J’ai envoyé mon manuscrit à six maisons d’édition, j’ai reçu plusieurs réponses positives dont celle de Bernard Fixot.

Qu’y a-t-il au départ de « Nuit », votre nouveau roman ?
J’ignore pourquoi, mais j’avais en tête l’image d’une plateforme pétrolière, au fin fond de la Norvège. Mes livres débutent toujours par un décor, un lieu, une atmosphère. Et comme depuis mon premier livre, la presse me qualifie du plus scandinave des auteurs français, c’était un petit clin d’œil…

Hirtmann, votre tueur en série, était dans une autre vie, procureur à Genève. Que vous ont fait les Suisses pour vous venger ainsi ?!
Rien du tout, j’adore ce pays au contraire. Mais je voulais qu’il ait un nom à consonance allemande, tout en parlant français. Donc il me semblait que la Suisse s’imposait. Et il est originaire de la commune de Cologny, là où Mary Shelley a écrit Frankenstein.

Vous ne ménagez pas non plus votre héros, Servaz. Un miracle qu’il soit encore vivant.
C’est vrai que je lui inflige pas mal de tracas, mais il s’en sort plutôt bien ! Les épreuves permettent de montrer ce qu’on a dans le ventre. J’essaye toujours de ramener mes personnages à leur côté terre à terre, de les attacher aux petits détails du quotidien, cela les rend plus accessibles. Et Hirtmann, malgré sa folie, reste néanmoins un être humain.

Comment préparez-vous un nouveau roman ?
J’y pense, je note des petites scènes, une phrase, un bout de dialogue, plein de trucs différents. Un roman, c’est comme un iceberg, mais je suis le seul à connaître ce qui se trouve sous la surface. Je ne peux pas tout expliquer, ce serait laborieux, mais c’est cette connaissance que j’ai de mes personnages qui rend l’intrigue plausible. Je commence déjà à travailler sur mon prochain livre, ce sera une intrigue sans Servaz. Son univers est très difficile à gérer, car il faut prendre en compte tout ce qui s’est passé dans les enquêtes précédentes, et cela me repose de le laisser de côté pendant quelque temps. Et comme je suis un fan de séries télévisées, je suis également en train de travailler sur un scénario original avec un personnage principal de femme. Il me semble maintenant que la télévision ose des choses que le cinéma ne fait plus.

Propos recueillis par Pascale Frey

 
 
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