Charlotte est artiste-peintre mais depuis son mariage avec Henry, leur installation à Cambridge et la naissance de ses deux petites filles, elle n’a plus de temps à elle pour s’installer devant une toile et peindre.
Son mari, Anglo-indien, bien que vivant depuis longtemps en Angleterre ne supporte plus le ciel bas, l’humidité, le froid. Il rêve de soleil et de chaleur et veut partir s’installer en Australie. Nous sommes en 1963 et à cette époque, le gouvernement australien payait les frais de traversée et d’installation à toute famille désireuse de venir s’installer au pays des kangourous.
Si Charlotte est réfractaire à cette idée et s’y oppose, elle finira par céder, Henry ayant trouvé un poste à l’université de Perth. Et c’est sous une écrasante chaleur que la famille va s’installer dans une maison dont le jardin ressemble au désert.
Henry est confiant dans l’avenir, ou tout au moins veut se persuader que tout va bien se passer même si rien ne correspond à ce qu’on lui avait promis : ni son poste à l’université, ni la maison.
Charlotte, au début, tente elle aussi de s’acclimater mais elle s’ennuie, souffre de solitude. Les choses vont aller de mal en pis.
« De l’autre côté du monde » parle avec sensibilité et justesse de la quête d’identité et de la tentative d’appropriation, d’intégration que tout individu vivant dans un pays étranger ressentira : « Il comprend qu’il sera toujours en marge, que le pays où il habite ne sera jamais celui d’où il vient. Pendant longtemps, il s’est dit que l’habitude aidant, il s’adapterait, soutenu par les coutumes auxquelles il se pliait. Au début, il était convaincu que ces choses-là finiraient à la longue par ne plus avoir d’importance. Mais il se trompait, elles en ont, elles en auront toujours. »
Mais aussi de la quête d’une femme pour aller au delà de son rôle de mère de famille et vivre sa passion malgré les tiraillements qui la font souffrir : « Ces oscillations extrêmes de son humeur l’épuisent : voilà à quoi ressemble la vie quand on a des enfants, elle le sait maintenant. Elle pense à la journée qu’elle a devant elle et se sent fatiguée, encore plus fatiguée, les bras et les jambes lourds. Il ne faut jamais relâcher sa vigilance : May est capable de mettre dans sa bouche n’importe quoi, un cafard mort, une coquille d’escargot, et les questions de Lucie exigent des réponses. Sans cesse il faut surveiller, sans cesse il faut expliquer. »
J’ai aussi particulièrement apprécié les descriptions de paysage qui mettent si bien en exergue les différences entre l’Angleterre et l’Australie. Excellent moment de lecture.