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coup de coeur
Dystopie malheureusement plausible
J’ai commencé par son dernier livre, C’est le cœur qui lâche en dernier qui m’a époustouflé. Je retrouve, dans « La servante écarlate », la même trame dystopique.
coup de coeur
Margaret Atwood, l’une de mes auteures préférées, a publié ce roman en 1985. J’avoue qu’en lisant le résumé de la quatrième de couverture, je n’avais jusqu’à présent pas été attirée par cette histoire. Mais la nomination de Trump, l’évolution de la situation aux Etats-Unis m’a donné envie de le lire. L’auteure place son histoire à une époque pas très bien définie dans le temps : futur proche ou lointain, rien ne permet de le dire. Ce que l’on sait, c’est que la fécondité a fortement chuté et que très peu de femmes peuvent encore donner naissance à un enfant. Dans la République de Gilead, des fanatiques religieux ont pris le pouvoir, bouleversant complètement la vie de milliers de gens. Certains ont réussi à s’enfuir tandis que d’autres se sont convertis, à défaut pliés, au mode de vie imposé par le nouveau gouvernement. Tous ceux qui sont considérés comme impurs, déviants ou ne pouvant s’adapter sont soient assassinés ou déportés. Les femmes en âge de procréer sont regroupées dans un Centre où elles sont dressées, formatées pour devenir des mères porteuses pour les familles aisées. Ce sont les servantes écarlates. La narratrice se nomme Defred. C’est ainsi qu’elle a été rebaptisée, cela signifie qu’elle appartient à Fred, prénom du commandant à qui elle a été attribuée. Elle nous raconte sa vie quotidienne sous la surveillance permanente de chaque membre de la maison, des Anges et des Yeux qui circulent dans les rues. Elle se remémore parfois sa vie d’avant : son mari, sa petite fille, ses amies. Et elle se demande comment la société a pu basculer : » Rien ne change instantanément. Dans une baignoire qui se réchaufferait progressivement, on mourrait bouilli avant de s’en rendre compte. Il y avait des histoires dans les journaux, bien sûr, de cadavres dans des fossés ou des forêts, matraqués à mort ou mutilés, violentés comme ils disaient, mais il s’agissait d’autres femmes et les hommes qui faisaient ces choses-là étaient d’autres hommes. Aucun ne faisait partie des hommes que nous connaissions. Les articles de journaux étaient pour nous comme des rêves, de mauvais rêves, rêvés par d’autres. Quelle horreur disions-nous et c’était horrible, mais c’était horrible sans être crédible. C’était trop mélodramatique, cela avait une dimension qui ne faisait pas partie de vos vies. » Puis vint le jour où toutes les femmes actives ont été virées manu militari de leur lieu de travail, leurs comptes bancaires bloqués. Beaucoup ont atterri au Centre où on leur apprend, de force si nécessaire, à baisser la tête, à se taire, à accepter de se faire violer (il n’y a pas d’autre mot) une fois par mois au cours d’ un rituel qui pue l’hypocrisie religieuse et la bien pensance. Le seul but étant de donner un enfant au couple à qui elles ont été prêtées. Margaret Atwood dans ce roman rejoint la pensée de Simone de Beauvoir pour qui il suffirait d’une crise économique pour qu’on en vienne à nouveau à s’en prendre aux femmes et à leurs droits. Elle explique que « la fondation profonde des Etats-Unis n’est pas l’ensemble de structures de l’âge des Lumières du XVIIIème siècle, relativement récentes, avec leurs discours sur l’égalité et la séparation de l’Eglise et de l’Etat, mais la brutale théocratie de la Nouvelle-Angleterre puritaine du XVIIème siècle, avec ses préjugés contre les femmes, et à qui une période de chaos social suffirait pour se réaffirmer. » Et quand on regarde attentivement ce qui se passe aux Etats-Unis (mais pas que) : remise en cause du droit à l’avortement, accès difficile à la contraception, discours racistes etc… , on se dit qu’il y a péril en la demeure et qu’il convient d’être extrêmement vigilant. |
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