L'Ivresse du sergent Dida
Olivier Rogez

Le Passage
août 2017
 18 €
ebook avec DRM 9,99 €
 
 
 
 La rédaction l'a lu

La bonne étoile du sergent Dida

C’est un drôle de type ce sergent Dida. Soldat d’une de ces armées d’Afrique de l’ouest, un peu paumé, qui tue le temps plus qu’il ne fait la guerre. Dans son uniforme élimé, à attendre sa maigre solde, il contemple le monde et sa morne vie, habité par la seule ambition d’être à demain. Un brave gars sans histoire. Jusqu’à ce qu’Olivier Rogez s’en mêle.

Le chef de l’état de cette république fantoche meurt, provoquant une vive émotion dans le pays. C’est alors que l’adjudant Dida, devenu capitaine, prend conscience de la situation économique et politique de son pays. Il prend la mesure de l’arrivisme et de la corruption des fonctionnaires et des politiques arrosés par des multinationales qui se déploient sans vergogne sous le regard attentif et compréhensif des puissances étrangères qui comptent, à savoir la France, les USA et la Chine.

On se retrouve dans cette capitale grouillante, avec ces maquis d’où s’échappent des odeurs de poulets grillés, ces bars louches où des filles vendent leur vertu en faisant croire qu’elles s’amusent, et ces militaires odieux, brutaux, cyniques qui friment dans leur 4 x 4 rutilants. Sur la place de l’Indépendance, on assiste aux manifestations de masse d’un peuple qu’il est si facile de manipuler. Et tout cela aux côtés de Dida, devenu un personnage clef (nous n’en dirons pas plus, car il y a un vrai suspens…) qui se demande quel est son rôle, ce qu’est le pouvoir, comment on le prend, comment on le garde et pour en faire quoi. Insensiblement le récit se transforme en un conte sur les rapports entre l’autorité et le peuple et sur l’émergence de la démocratie dans ces pays qui oscillent entre indépendance et vassalité, entre tradition et modernité.
Un mot sur le ton et sur le style. Ce livre ne tombe jamais dans la morale ou un manichéisme béat qui verrait les gentils noirs s’affronter aux méchants blancs. Olivier Rogez, journaliste à Rfi, connaît trop bien la réalité pour tomber dans la caricature et c’est cela qui rend son livre passionnant, écrit dans une langue efficace et simple avec de belles trouvailles comme cette première phrase « Le sergent Dida n’avait jamais rencontré sa bonne étoile, aussi ne levait-il plus les yeux vers le ciel. » Ca commence bien, non ? Lisez La suite !

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