« Comme nous avions juste assez de vent pour rentrer, personne ne parlait, nous ne voulions pas gâcher cet instant, et nous étions des muets heureux aux visages radieux, incapables d’expliquer cette sensation, y compris à nous-mêmes. Voilà peut-être pourquoi je continue à emmener des gens en bateau : j’espère que quelqu’un finira par transcrire ce sentiment avec des mots. »
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A Seattle, Bernard, Josh et Ruby ont été biberonnés à la voile. Chez eux, la Bible c’était Moitessier, Slocum et Einstein. Les père et grand-père fabricants de bateaux, la mère physicienne dingue d’Einstein. Toute leur enfance à naviguer en permanence, avec le moto du père : « vitesse, vitesse ». Et puis la famille a éclaté. Ruby est partie faire de l’humanitaire en Afrique, Bernard s’est impliqué dans des mouvements contestataires, la mère s’est réfugiée dans son monde intérieur et Josh, le narrateur, répare des bateaux sur un chantier à 1 h de Seattle. Chroniqueur attachant, il n’en finit pas de chercher sa place dans cette famille et dans la vie en général… On met un petit moment à trouver la nôtre dans ce roman qui peut désarçonner dans un premier temps : éclatée dans le temps (même si la progression est linéaire), la narration se construit à travers des instantanés déclinés par thème et use de nombreuses ellipses, que l’on en vient à chérir comme autant de pudiques voiles. Concentré d’émotions pures et variées, on rit autant qu’on tressaille et je défie quiconque de ne pas avoir envie de foncer sur un voilier une fois la dernière page tournée. Intense.