critique de "My Absolute darling", dernier livre de Gabriel Tallent - onlalu
   
 
 
 
 

My Absolute darling
Gabriel Tallent

Editions Gallmeister
mars 2018
464 p.  24,40 €
ebook avec DRM 16,99 €
 
 
 
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coup de coeur

Du John Green sous acide

Flutain !

Oui, je ne peux dire que ça en essayant de ne pas être vulgaire, parce que figurez-vous que cette lecture a été la plus difficile depuis ce début d’année.
Pas parce que le livre était mauvais, pas parce que l’écriture était mauvaise, pas parce que l’écriture n’avait ni queue ni tête, NON !
Cette histoire est époustouflante de colère, de perdition, de tristesse et d’amour. Un amour déviant, un amour toxique. Dévastateur. J’ajouterais que la possession maladive est au cœur de ce roman.

Du génie ? Je pense.
Cru ? Certainement et c’est bien cela que j’ai pris en pleine face sans comprendre.
Le quatrième de couverture pourrait nous faire penser à un John Green, parce que Turtle – Julia – Alveston est une adolescente, mais un John Green sous acide. Un John Green qui aurait remisé sa bienséance au placard et y aurait mis le feu ! Donc, ne vous fiez pas au résumé de l’éditeur. Il est beaucoup trop édulcoré. Mais cela a le mérite de laisser toute la surprise.

Les périodes de malaises intenses entrecoupées de périodes plus légères lors des apparitions de Brett et Jacob donc un rythme d’asphyxie, comme si l’on se noyait et tentait de reprendre son souffle brièvement.

Mon seul bémol ? Parfois les descriptions un peu trop longues.

Si vous aimez être bousculés, je ne peux que vous le conseiller.
Si vous ne supportez pas la vulgarité, passez votre chemin dans regret.

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coup de coeur

Sortir du marais insalubre… émerger sans cesse… émerger …

C’est une lecture qui ne vous laisse pas indifférent mais surtout qui vous ébranle jusqu’au fond de votre être tant l’inimaginable, à travers l’ineffable, est exacerbé par la narration haletante.

Voyage jusqu’aux abysses de la violence… c’est soit insupportable et on pose le livre pour ne pas poursuivre plus loin ce récit truffé de maux qui mettent à vif chair et âme. Nature sensible, il faudra s’abstenir…

De l’amour aux dimensions de la folie, la perversité tient essentiellement au doute de soi-même ancré en soi au point que l’on se demande, au fil des pages, jusqu’à quelle extrême limite, Turtle, 14 ans, va supporter les coups, les souillures et la honte… Il y a le désir et son contraire aux portes de la schizophrénie.

Quand la vie est un enfer le quotidien banalise le mal, l’abjecte, l’immonde au point que l’immoralité devient compagne aussi salutaire qu’horrifique.

Ce roman bouscule les tabous, les règles de la bienséance et du respect de la vie d’autrui. On peut trouver cela absolument dégueulasse, un parcours d’ignominie où un père possessif a fait « sienne » sa propre fille, un jouet vivant qu’il adore, adule et maltraite au gré de ses humeurs et pulsions, qu’il peut transformer sous sa fureur complètement débridée, en pantin désarticulé qu’il laisse choir dans la boue et dans l’opprobre, après coups…

En quoi serait-il intéressant de se plonger dans un tel délabrement de la nature humaine, dans un tel chaos psychique où bourreau et victime sont apparemment complices à la fois dépendants et soumis l’un à l’autre, dans une dualité infernale.

En fait, le lecteur est fasciné par la force intérieure des personnages : la fille, son père et son grand-père, un trio maléfique où l’humanité le dispute à l’inhumanité… Ces êtres sont loin d’être falots plats et sans envergure, bien au contraire, ils sont intelligents, instruits, tenaces et barbares… , Cherchez l’erreur !…

L’écriture est dense, haletante. La traduction n’a pas dû être facile pour respecter le style et l’intention narrative de l’auteur. Je dois convenir que j’ai eu du mal à me faire au récit où la narration décrit simultanément l’action, le cadre où elle se déroule, les échanges de propos, la pensée de ceux qui les émettent, les sensations qu’ils éprouvent intérieurement faisant écho à celles qu’ils relèvent émanant de l’environnement qui, ne leur restant pas indifférent, s’unit et fait corps avec ces êtres en confrontation. Les longs paragraphes constitués de soliloques, de descriptions de paysages alternent avec les dialogues où les répliques sont vives mais aussi hachées par la hargne, la culpabilité et l’envie de s’imposer ou de s’extraire de façon illusoire à la sinistre réalité et à la percutante vérité.

Dans un même paragraphe, il arrive que, d’une phrase à la suivante, on est transféré subitement dans un autre moment, ou dans un lieu différent… Il faut suivre… ça bouscule notre attention en même temps que ça la stimule.

Tout ceci, page après page, entretient le suspens si bien qu’on ne lâche pas la lecture, subjugué par la jeune Turtle qui se débat corps et âme contre cette terreur quotidienne, les armes à la main… Elle ne se plaint à personne de ce qu’elle endure et ne parle à personne de son martyre dont elle se sent autant responsable que celui qui lui inflige.

Tourments, souffrances l’ont endurcie ; elle peut affronter les pires déchaînements y compris ceux de la nature, vents et marées du Pacifique, noirceur des nuits, des gouffres, elle en revient labourée sur tout le corps, profondément meurtrie dans l’âme mais demeure « incassable »

Elle éprouve et se demande pour son père et pour elle : qu’est-ce que le manque ? Qu’est-ce que l’absence ? Qu’est-ce que le cri ? Chez Turtle c’est en permanence un foisonnement de sensations, de pensées éclairs qui, dans sa tête, se déversent comme cataractes, un déluge permanent submerge son âme, agite et broie son corps .

On arrive également sur des passages épiques pimentés d’aventures et d’actes héroïques… La narration est parfaite au point que nous nous trouvons au cÅ“ur de l’action, éprouvant toutes les sensations mais aussi les émotions que vivent les personnages, l’image est omniprésente avec des contours de paysages très nets. On participe pleinement aux scènes où peurs, doutes, témérités, douleurs sont vives, tantôt en apnée ou en apesanteur, tantôt tétanisé par l’angoisse, on progresse dans une nature qui exige que l’on soit aussi sauvage qu’elle.

Quelques lignes d’un passage page 216… Turtle évoque une conversation avec son grand-père quand elle était petite fille. Il lui disait :

« Ne pense jamais que le nom est la chose, car il n’y a que la chose qui existe, les noms ne sont que des pièges, des pièges pour t’aider à t’en souvenir. » Elle repense à eux deux, Turtle qui courait sans cesse, s’arrêtait et revenait sur ses pas, tandis que Papy peinait dans l’herbe et le terrain accidenté. Seulement après qu’elle lui avait décrit avec ses propres mots où poussait la plante et comment elle était, lui expliquait-il de quoi il s’agissait, la dépiautant entre ses doigts. « Ça, ma puce, c’est de l’épillet, et ça, les plumes, tu vois comme elles sont longues ? Ça, c’est la barbe. Tu vois comme elle tourne dans la partie inférieure, et comme le haut est incliné ? Continue à observer avec autant d’attention. Continue comme ça à observer comme si tu ne connaissais rien, à observer pour comprendre de quoi il s’agit vraiment. C’est ça qui permet à une petite puce d’être, calme et silencieuse pendant qu’elle marche dans l’herbe. Observe les choses pour comprendre ce qu’elle recèlent, ma puce, toujours, toujours. »

Voilà bien une leçon de chose très singulière mais ô combien proche de la réalité et des vérités que celle-ci contient. « Le mot n’est n’est pas la chose » et il apparaît que cette dernière n’existe que par l’observation attentive qu’on lui accorde. La connaissance est, avant tout, empirique… On découvrira, au début du roman, que Turtle a beaucoup de mal avec les mots ce qui ne l’empêche pas de saisir d’emblée la nature profonde des êtres et le caractère particulier de toute nouvelle situation, ceci, grâce a son excellent sens de l’observation.

Autre passage pages 312-313… échanges entre Turtle et son père :

Tu n’as pas l’air très embête, dit-elle.

Pourquoi ?

Cette gamine elle a mal.

Tu sais, dit Martin, certaines personnes pensent que la douleur est une bonne solution au solipsisme.

Hein ?

Le problème, c’est qu’on a aucune preuve que les autres humains sont conscients et vivants comme nous. Nous on sait qu’on est conscients car on fait l’expérience directe de nos pensées, de nos émotions, de cette manière inquantifiable qu’on peut éprouver à se sentir vivants, mais on n’a aucune expérience de la conscience des autres, si bien, si bien, qu’on n’est pas certains qu’ils soient vivants, vraiment, vivants, qu’ils aient une expérience de leur propre vie identique à la nôtre. Peut-être qu’on est la seule et unique personne réelle, entourée par des coquilles vides qui se comportent comme des gens mais qui ne sont pas dotées d’une vie intérieure comme nous.

S’en suit une réflexion philosophique sur le fait que, de la souffrance d’autrui, la douleur nous est inaccessible ce qui met en lumière le gouffre infranchissable qui sépare son propre esprit humain de tous les autres, et de toutes personnalités étrangères. Ceci, faisant état de la nature des échanges humains, non pas de l’état social ou imaginé… « La communication n’est qu’un fin vernis Croquette »

Voilà qui, à partir de cette notion de solipsisme, mot que ne connaît pas Turtle (Croquette), on peut saisir l’ambiguïté de ce père (Martin) qui peut à la fois être attentif et indifférent au sort des autres, dont les connaissances philosophiques sont parfois pointues mais interprétées au fond de lui-même jusqu’au négativisme pernicieux et pervers.

En conclusion, bien que l’intrigue soit entièrement bâtie dessus, ce roman ne fait pas l’apologie de la violence mais met en exergue la possession obsédante de l’autre… une confusion extrême qui a spolié l’enfance et l’adolescence de Turtle, et dont elle tente sans cesse de se sortir malgré des réticences affectives vives et des critères éthiques qu’elle estime inaccessibles, irréalisables pour elle. Sa jeune existence est une constante émergence…

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on n'aurait pas dû

Tallent ou talent?

La question est : que cherchez-vous Mr Tallent avec cet ouvrage? A cette question – pas si simple – posée à un écrivain, on a du mal à répondre…

Tout est laid et sonne faux dans cette histoire: un père pédophile et sadique, pseudo philosophe (à l’américaine : on cite Hume ou Kant le colt à la main…), l’héroïne, une fille dégingandée (la tortue) victime plus ou moins consentante des agissements du père, un grand père qui comprend mais laisse faire (lui même a un lourd passé… tu m’étonnes…), des amis, nouveaux écolos, qui ne comprennent mais…, un prof qui ne réagit pas mais s’auto flagelle en permanence, un pique nique qui finit en mode survivants dans la souffrance et les bouteilles en plastique, une opération chirurgicale à vif sur une enfant de 9 ans avec canif et produits d’entretien, une partie de campagne où l’on croque… des scorpions (ben voyons…), une éducation au fusil et au révolver… (ça vous forge un caractère…), un jardin potager qui foire systématiquement, un dénouement qui baigne dans le sang et les poches d’excréments…
Et j’en oublie.
On reste pantois…
Si l’objectif (de GT) est de tenter d’expulser de lui-même son propre trouble personnel par un phénomène de catharsis… alors on peut peut-être avoir un début d’explication…
J’ignore les antécédents de cet homme, mais déverser dans un livre autant de pourriture physique et métaphysique à l’exclusion de tout autre élément … tient à mon sens plus de la médecine que de la littérature.
Alors, pourra-t-on (me) dire : mais n’est ce pas toujours le cas des grands écrivains? ne déversent-ils pas dans leurs oeuvres leur propre psychose? On pense à Nabokov, à Tournier, à Nietzsche sans doute et à tant d’autres.
Oui sauf que…
N’est pas Nabokov qui veut…
Et il ne suffit pas de déverser des excréments dans un texte pour en faire un chef d’oeuvre…
Ce livre est une imposture (à mes yeux évidemment).
N’était peut être la luxuriance de la végétation qui annonce la putréfaction générale…
Finalement Gabriel, il ne vous manque que le talent…!

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Grande déception …

Ai-je un problème avec ce roman par rapport à son contenu ou à sa forme ? Je l’ignore, mais ce qui est certain c’est que je ne comprends absolument pas l’engouement de certains lecteurs, fascinés, éblouis (aveuglés) par ce texte que personnellement je trouve sans grand intérêt.
Le personnage central est odieux et son père n’est pas mieux. Aucune compassion ni pour l’un ni pour l’autre.
L’usage excessif de vulgarité me dérange réellement et n’est pas justifié.
Les personnages secondaires sont d’une platitude ahurissante.
L’histoire en elle-même est certes violente mais ressemble à tant d’autres récits traitant du même sujet.
Des descriptions sans fin, des longueurs, un contexte noir et glauque que j’ai du mal à appeler littérature.
Bref, mis à part la nature fort bien dépeinte, je n’ai pas aimé ce roman et je sais ne pas être la seule, ce qui me rassure.

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coup de coeur

Pour commencer, je vais dire : « record battu » ; mais pas record de vitesse pour lire « My Absolute Darling » car c’est contraire à mes habitudes ; non cette fois c’est « record de lenteur ». En effet, il m’a fallu presque une semaine pour lire ce premier ouvrage de Gabriel Tallent. Ensuite j’ai hésité à écrire ma critique car ce livre a largement été commenté. Mais je suis dit : « au fond, pourquoi pas moi aussi ? ».

Le décor : Une vieille maison sur une colline. La peinture écaillée, de la mauvaise végétation qui envahit les bardeaux, une allée de graviers jonchée de douilles vides…. C’est l’habitation de la jeune héroïne de quatorze ans, Julia Alveston / Turtle / Croquette (en fait elle préfère qu’on l’appelle Turtle). Elle vit ici, seule avec son père Martin (qui lui, l’appelle toujours Croquette). Une habitation située à Mendocino sur la côte nord de la Californie, où la faune et la flore sont particulières ; une nature sauvage ; il y a un peu de nature writing dans cette Amérique profonde. Les endroits que Turtle affectionne le plus ? Des plages et des îlots rocheux où elle se promène pendant des kilomètres. Son unique vie sociale se résume en ses cours au collège (quand elle y va).

Avec la critique de Marie-Claire :  « Vous lirez ce livre l’estomac noué, complètement gagnés à la cause de son héroïne ».
Ou celle, parmi tant d’autres, de Stephen King : « Le terme de « chef-d’œuvre » est bien trop galvaudé, mais il ne fait aucun doute que My Absolute Darling en est un. »
En effet, s’il m’a fallu ce temps pour finir ce livre, c’est bien parce que c’est un véritable coup de poing et je comprends qu’il ait si rapidement un succès fulgurant.

Par contre, il faut bien signaler que cet « amour absolu » de Martin pour sa fille (c’est d’ailleurs une expression qu’il répète plusieurs fois), est un amour fou, violent, abusif. A tel point que Turtle, dominée par la peur de lui déplaire et de partir pour lui échapper, en est venue à ressentir une forme d’amour, de résignation. En fait, elle ne sait plus comment réagir.

L’auteur nous entraîne dans ce drame que vit Turtle, dans sa souffrance, sa passivité, mais aussi dans sa haine qui grandit et grandit et qui cherche le moyen de se débarrasser de toute cette horreur causée par son père monstrueux, mais également faible car il souffre d’anciennes blessures dues à la perte de sa femme et son aversion contre son père ainsi que la société. De toute façon, on ne peut lui trouver aucune excuse. Il fait subir un véritable calvaire à sa fille qui, enfin, fait la connaissance de Brett et Jacob qui vont tenter de l’aider mais cela leur vaudra d’être menacés par la violence de Martin qui dit à sa fille : « Tu es à moi, rien qu’à moi, mon amour absolu ».
Une autre personne essaie de lui porter secours, Anna, sa professeure au lycée, qui devine en Turtle les signes d’une adolescence abusée. En page 149, on peut lire :
« Anna dévisage Turtle avec attention.
– Vous croyez que mon père me bat, dit Turtle.
– Je m’inquiète pour toi. Tu présentes beaucoup de symptômes classiques. La méfiance. L’isolement social. La misogynie.
– C’est quoi, la misogynie ?
– La haine des femmes ;
– Il ne me bat pas. «

Turtle persiste donc dans son déni car elle est trop troublée par les réactions que pourrait avoir son père s’il apprenait qu’elle pourrait obtenir de l’aide. Il va lui falloir beaucoup de temps pour enfin se décider à réagir mais là aussi c’est une action bouleversante de douleurs. Elle ne quitte jamais son revolver (car son père lui a appris toute jeune à tirer) et elle nettoie sans cesse sa précieuse arme.

L’auteur n’accorde aucun répit au lecteur pendant tout ce drame et c’est la raison pour laquelle j’avais besoin, de temps en temps, de sortir de ce récit avec tous ses événements tragiques.
Très souvent, un livre annoncé comme LE phénomène littéraire en tant que premier roman, me laisse un peu perplexe. Mais je dois avouer qu’ici, Gabriel Tallent a fait une entrée remarquable dans la littérature américaine. Il a tout de même eu besoin de huit ans pour l’écrire.
A signaler l’excellente traduction de Laura Derajinski et la magnifique couverture.
De plus, avec « My Absolute Darling », les Éditions Gallmeister ont fait un début d’année 2018 fracassant.

On ne ressort pas indemne mais c’est vraiment un huis-clos, un livre phénomène avec toutes les gifles que l’on reçoit car on est corps et âme avec Turtle en voyant tout ce qui se passe et en se demandant comment tout cela est possible. Dire que Turtle est extraordinairement courageuse n’est pas assez (surtout en considérant son jeune âge et elle fait preuve d’une grande maturité), car elle est bouleversante et nous touche au plus profond de nous. Le déclic se fait en elle quand son père ramène chez eux la petite Cayenne.

Voici pourquoi j’ai mis tout ce temps pour la lecture – il fallait que je souffle un peu après certaines scènes inracontables – alors que, pourtant, je ne crains nullement ce genre d’histoire, que l’on peut qualifier de « p..ain d’histoire », un mot très souvent employé, surtout par les deux principaux personnages, Martin et Turtle.

A présent je vais me tourner vers une autre lecture un peu plus reposante mais sans aucun regret d’avoir lu « My Absolute Darling » (au contraire) et j’adresse un grand « Bravo », non seulement à l’auteur mais aussi aux Éditions Gallmeister qui ne dérogent pas à leur règle : « Préférer la qualité à la quantité » et là, c’est fait avec un sensationnel « Tallent ».

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coup de coeur

Livre choc !

Quel livre ! Percutant, dérangeant, très bien écrit. L’auteur crée entre le lecteur et le personnage principal, Turtle une relation forte, tendue et en totale empathie.
C’est un livre sur l’emprise d’un père pervers narcissique sur sa fille de 14 ans qu’il a totalement chosifiée. Turtle sent intuitivement que cette relation n’est pas normale mais comme elle ne connaît rien d’autre elle a du mal à s’en détacher. La relation fusionnelle d’amour-haine qui la lie à son père est particulièrement bien décrite et sans concession.
C’est un livre qui vous happe, qui vous marque et qui ne vous lâche pas, même lorsque vous l’avez terminé. Turtle est gravée dans ma tête pour toujours.

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nuit blanche

Un roman choc et dérangeant

Turtle, Cracotte, de son vrai nom, Julia Averston vit seule avec son père.Cette jeune fille de 14 ans sait manier le fusil comme un as! Elle a été élevé à la dure, par un père porté sur la bouteille, associal, une sorte de paria de la société!

Turtle n’a pas d’amis, elle est plutôt renfermée surtout qu’elle ne vit pas avec les mêmes codes que les autres collégiens.Habillée en militaire, quand elle rentre chez elle, c’est dans ce que j’imagine être une cabane/taudis plus qu’une maison. Pas de meuble, pas de lit, elle vit en permanence dans la survie quotidienne et survie dans la nature. Elle parcourt la forêt pieds-nus, armes à la main et peut marcher des heures durant. Son père l’élève à sa façon, dans le dénuement et la brutalité. C’est son quotidien, sa normalité, jusqu’au jour où elle rencontre Jacob. Cela va bouleverser sa vie, ses pensées et réveiller sa conscience.

Quand j’ai commencé la lecture, je n’ai pas compris en quoi se roman pouvait être dur et choquant. Ok, Turtle vit dans la pauvreté, en marge de la société avec un père sombre qui attend l’Apocalypse, et après? Justement, c’est après et au fil des pages que je découvre avec effroi à quel point Turtle vit sous l’emprise d’un homme tourmenté et pervers. Je prends pleinement conscience de la perversité de cet homme, de son emprise sur sa fille. Les rapports entre eux sont plus que malsains, ils sont incestueux. Les rares dialogues qu’ils ont ensemble sont ponctués de vulgarité. D’ailleurs violence et vulgarité ponctuent le livre.  Turtle subit et heureusement son grand père apporte un peu de répit dans sa vie.

Sa rencontre avec Jacob va la réveiller, va la faire réagir et surtout va la faire se questionner sur elle, sur sa vie, sur ce qu’elle veut. De là, tout va s’accélérer, tout va aller crescendo… De l’amour à la haine à la folie, il n’y a qu’un pas…

Oui, je peux le dire, j’ai pris une claque avec ce roman sombre. Si je ne m’étais pas attachée au premier abord à Turtle que je trouvais froide et inamicale, j’ai commencé à me prendre d’affection pour elle et avoir envie de la protéger. Ce personnage plein de courage et d’envie de vivre m’a bouleversée. Et j’ai détesté son père.

Ce roman parle d’amour (oui, oui) et de haine, de force, d’espoir, de confiance en soi, en la vie, d’inceste mais aussi de résilience. Turtle vit une étape de sa vie où elle s’affranchie de son père pour vivre sa vie. Ce n’est pas un chemin facile surtout que plus j’ai avancé dans ma lecture, plus j’ai eu mal au ventre et j’ai été en colère. Et si vous croyez que vous avez tout lu, détrompez-vous, les derniers chapitres sont encore pires!!!

L’auteur décrit tellement bien les scènes, que je me suis vue dans une sorte de jungle et j’avais mal pour Turtle. Malgré la violence de l’histoire, l’écriture reste fluide et l’auteur arrive à nous faire sentir la douleur!

Ce roman est fort, puissant, extrêmement dérangeant et prend aux tripes. A ne pas mettre entre toutes les mains.

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« Elle pense, Au moins tu as ça : tu t’as toi-même. »

Sacrée enfance que celle de Julia Alveston. Une cabane au fond des bois, déjà pas banal, mais surtout un père totalement ravagé – et on n’imagine pas à quel point. Elle s’adresse à elle-même comme Turtle, son père l’appelle Croquette – les deux emploient également indifféremment « connasse ». Tous les matins, après avoir gobé des oeufs crus et lancé une bière à son père, Turtle lui dit qu’il n’est pas obligé de l’accompagner jusqu’à l’arrêt du bus scolaire. Il dit qu’il sait. Puis l’y accompagne. Et Turtle entame sa journée au lycée. Elle a quatorze ans, l’âge où la puberté s’en mêle. Son père n’a pas l’intention de regarder les choses changer. Turtle, elle, n’a aucune idée de qui elle est, au fond. Adolescente étrange et asociale (on le serait à moins), elle rencontre Jacob, un esprit brillant et détaché… Un premier roman dérangeant au possible qu’on n’envisage pas un seul instant de lâcher et pourtant, quelle souffrance. Il y a plusieurs scènes d’une douleur tellement suffocante que j’en ai eu la nausée (physique). On n’en revient pas de la succession d’horreurs qui s’accumulent, c’est excessif, de toute évidence, mais pire, c’est crédible. On ne peut pas laisser Turtle subir sa vie toute seule, sans nous, alors on l’accompagne page après page, comme sous un sortilège. La plume est envoûtante, tout en rupture de rythme. En confidence, on est très soulagé quand ça s’arrête, quand même. On vient de lire un texte qui ne ressemble à aucun autre. Ouf, quel morceau !

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coup de coeur

TUER LE PERVERS

Turtle a 14 ans, elle vit en lisière de la société, pleine nature sauvage ou ce qu’il en reste, avec son père, Martin. Son père, son amant aussi, son pervers. Elle apprend à tirer, elle connait les armes, leur maniement, elle connait les araignées, les scorpions, la forêt. Lui pense que le monde est sur sa fin, que tous les signes sont là pour dire que l’inéluctable est proche. Les animaux disparaissent, la nature avec, tout semble fichu. Lui se complait, se plait dans sa relation incestueuse, crasse et violente avec sa gamine, sa « croquette » comme il l’appelle. Croquette. Aliment pour chien, chat. Fille de Martin. Abusée, frappée, humiliée, rabaissée. Le grand père tente de s’y opposer, en vain. Personne ne voit rien, ou laisse faire. Turtle, elle (qui n’a rien d’une tortue), de son vrai prénom Julia, subit, s’endurcit, se laisse faire, consent, se résigne, survit.
Ce roman est une histoire de survie, de lutte, d’acceptation de l’inacceptable, de relation de l’ineffable. Gabriel Tallent, jeune trentenaire qui fait plus vieux que son âge, a mis huit ans à l’écrire, nous apprend on.
Comment, à 20 ans, a-t-on l’idée de produire un tel conte cruel? Comment décrit on avec tant de justesse, de maîtrise, l’animal humain? Comment décrit-on si remarquablement une vie pourrie, de fond en comble, vermoulue, vénéneuse comme le sumac du premier paragraphe?
On pense à David Vann, parfois, autre auteur Gallmeister, on pense à Donald Ray Pollock, un peu aussi. On pense surtout tenir entre nos mains un terrible roman, sans longueurs, sans fautes de goût, dégeulasse comme il faut, qui met en évidence toute la nécessaire exigence de la littérature à montrer l’immontrable, à créer, parfois, des personnages extrêmes, tempétueux, infréquentables, capables de façonner des êtres increvables, immortels, résistants, plus grands que leur vie fétide.
Pour une fois, Stephen King aura raison de parler de « chef d’oeuvre », lui qui n’aurait jamais osé écrire un tel livre.

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