Elle : Elsa.
Lui : Bô.
Nous sommes au tout début du 20° siècle, et avec ces deux-là nous allons traverser les États-Unis sur quelques décennies.
Bô aurait été un pionnier d’exception, nanti de vraies qualités obscurcies par de monstrueux défauts ; toujours à la recherche du filon qui le rendrait enfin riche, mais démuni devant l’argent, amoureux pour la vie d’Elsa, mais mari exécrable.
Elsa, elle, se serait volontiers accommodée de vivre selon leurs moyens, pourvu qu’ils s’installent enfin quelque part et qu’elle ait un foyer à offrir à leurs enfants.
Mais ils s’aiment, elle le suit, ils avancent ensemble. Bô fait de très mauvais choix. Elsa sauve ce qu’elle peut, les enfants subissent. Les déménagements incessants, la vie en marge, la prohibition, l’épidémie meurtrière de grippe… La vie ne ménage personne.
Un excellent roman s’il en est, qui donne une envie urgente de chanter les louanges de Wallace Stegner jusqu’à ce qu’il obtienne enfin la renommée qu’il mérite tant. Les personnages sont pleins et entiers, on est traversés par des moments de lucidité glaciale qui viennent retentir dans notre vie à nous. Elsa et Bô sont jeunes et avides de vivre, ils « font le truc » pendant quelques années, puis cèdent la place à leurs enfants, tout en étant encore là, juste ils ne comptent plus autant, ils ne sont plus ceux qui font bouger les choses.
C‘est un roman touffu qui fait la part belle aux relations familiales, ou plutôt même qui prend une famille dès avant sa création, en amont, et qui nous permet de la suivre à travers toutes les étapes de sa vie, dans ses bons et ses pires moments. Tout sonne très juste, on se régale, on a bien du mal à lâcher nos héros de papier.
800 pages qui paraissent bien trop courtes, et qui se lisent dans une sorte d’urgence, pris dans les aventures narratives ; elles méritent sans aucun doute une relecture plus lente, pour se laisser pénétrer par la haute tenue des portraits psychologiques.