Charles est un enfant calme, discret, presque maladivement timide. Il voue à sa mère un amour exclusif passionné. Son père, il s’en préoccupe peu, c’est d’ailleurs réciproque. Il passe tout son temps au milieu des livres, lisant de manière compulsive, se constituant son propre personnage à l’image de ses héros de romans.
Malgré son caractère effacé, l’enfant nourrit de grandes ambitions : devenir Président de la République. Rien de moins. Pour se distinguer des autres, pour être au-dessus de la mêlée pour lutter contre le manque d’estime qu’il a pour le genre humain.
« Être au-dessus des autres, non pour les dominer mais pour s’en distinguer. Ne ressembler à personne. Ni maître ni exemple. Un homme libre tout simplement, dans un monde de moutons. Pas si facile, quand on est à ce point timide, mais peut-être nécessaire pour s’affranchir de cette sauvagerie, voire de cette misanthropie qui le coulerait par le fond, il le sentait bien, s’il s’y abandonnait. »
Alors qu’il a douze ans, sa mère tombe gravement malade. Sur son lit de mort, elle lui révèle qu’il n’est pas le fils de son père. Son géniteur est une personnalité très connue. Elle lui dira bientôt de qui il s’agit. Elle décède en lui laissant une enveloppe dans laquelle il trouve le nom de son père : Jean-Baptiste d’Orgel, le célèbre acteur à l’engagement politique chevillé au corps. Charles laisse tout cela de côté pour l’instant. Il se consacre à ses études et s’il en a encore envie il rencontrera son père quand il aura dix-huit ans.
À l’aube de sa majorité, alors qu’il est étudiant à Sciences Po, c’est un exposé sur l’engagement des artistes qui va être le prétexte à la rencontre . Quelle meilleure occasion pour faire enfin connaissance avec son père biologique ?
Très vite, Charles révèle à Jean-Baptiste qu’il est son fils. Le comédien le savait déjà. Il connaissait le nom d’épouse de son ancienne maîtresse et avait fait le rapprochement. La complicité s’installe entre les deux hommes. Le jeune homme révèle à son père son grand projet. L’acteur se confie lui aussi et raconte l’histoire du drame vécu par son père en Algérie et de la vengeance qu’il n’a pu accomplir jusqu’au bout. Les projets du fils coïncident avec la vengeance avortée du grand-père. Jean-Baptiste mettra tout on œuvre pour aider son rejeton à accomplir son destin.
De l’Algérie des années 40 à la France d’aujourd’hui, c’est l’histoire d’une famille que nous raconte Patrick Poivre D’Arvor. Le récit d’un drame qui trouvera peut-être sa vengeance de nos jours.
Dans ce passionnant roman initiatique, l’auteur nous montre le parcours d’un jeune Rastignac qui malgré sa timidité veut tout renverser sur son passage. De son enfance blessée par le décès de sa mère et l’indifférence de son beau-père, à l’entrée à Sciences Po et aux premiers pas dans la sphère politique, nous suivons les pas de Charles. Patrick Poivre D’Arvor nous décrit avec finesse et expertise, ce monde politico-médiatique qu’il connaît si bien. Un monde sans pitié, où les idéaux formateurs doivent vite être oubliés pour gravir les échelons du pouvoir. Un monde où l’on ne peut compter que sur soi-même et sur son ambition.
« – Un métier de chien, la politique, mon petit Charles. Ça ne suffit pas de croire en soi, il faut croire en la nullité des autres, il faut espérer leur chute et en attendant, aller chercher toutes les voix avec les dents. »
Charles parviendra-t-il à accomplir son destin ? Pour le savoir il faudra attendre la suite que je guette avec impatience. Ce premier tome, je l’ai lu d’une traite.