Frank et Charlotte parviendront-ils à échapper au danger pour vivre ensemble, enfin heureux ? Cela pourrait être l’accroche d’un roman sentimental un peu léger, c’est celle d’un polar lumineux et emballant. « November Road », le cinquième roman de Lou Berney mais le premier traduit en français, mêle noirceur et romantisme, traque infernale et amour fou. On est en 1963, à La Nouvelle-Orléans. Frank est une petite frappe cynique et sans ambition, un homme de main qui garde sa place au chaud au sein de la pègre locale en ne refusant jamais un sale coup. Le vent tourne à la minute où il comprend qu’il a aidé, sans le savoir, le véritable assassin de JFK à quitter le Texas. Devenu un témoin gênant pour les commanditaires et un homme à abattre, il prend la route, un de ses semblables à ses trousses, sans vrai plan ni projet.
Jusqu’à la rencontre, providentielle pour lui, de Charlotte et ses deux petites filles. Elle fuyait un mari alcoolique, la Californie en tête, quand elle est tombée en panne. Frank les embarque : ensemble, ils auront l’air d’une famille, la meilleure des couvertures. Les kilomètres aidant, chacun fait sa mue et oublie les conventions héritées de son milieu. Le truand se révèle avoir du cœur et de la sensibilité, la jeune mère du caractère et une âme d’artiste. Ils craquent l’un pour l’autre et entrevoient, à Las Vegas, la dernière porte avant un possible paradis. Toute la force du roman est là, dans la résilience de ce couple pris entre deux feux : un tueur qui approche dans l’ombre, une passion qui se nourrit de sa propre malédiction. Une double menace dont, jusqu’au bout, Lou Berney joue magistralement.