« C’est bizarre, abstrait, non, surréaliste – surréaliste est le mot – que je puisse appartenir au troisième âge, alors que je suis encore totalement moi-même, celle que j’ai toujours été, à quinze, trente-cinq, cinquante ans, celle que je suis en rêve, une masse constante, inchangée, tel un rocher ou un bloc de glace vieux de mille ans. Mon âge est comme détaché de moi. »
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Du premier roman de Maja Lunde, « Une histoire des abeilles », je reconnaissais la réussite écologique, j’étais moins convaincue par le côté romanesque. C’est encore un peu le cas pour ce deuxième roman (un quadriptyque écologiste est annoncé), mais j’ai beaucoup plus accroché à la partie se déroulant dans le futur. On alterne entre la Norvège de 2017 avec Signe, une dame fervente et batailleuse, et la France de 2041, où l’on suit David et sa fille Lou en exode climatique. Ils vivaient à Argelès, David travaillait dans une usine de désalinisation de l’eau de mer, mais ils ont dû se résigner à fuir lorsque les incendies ont pris le contrôle du territoire. Canicule, sécheresse, manque absolu de pluie et donc rareté de l’eau, voici ce qui nous attend. Camps de réfugiés espérant rejoindre les pays du nord, les pays de l’eau. (Au pire, ce sera l’Angleterre, qui par ironie est le pays le moins désiré par les migrants du futur…). Signe vit au moment où les décisions qui pourraient inverser (temporiser, disons) les terribles échéances à venir ne sont pas prises, elle lutte de toutes ses forces, voit les différentes initiatives, toutes insuffisantes (elle semble penser que même ceux qui les soutiennent n’y croient pas vraiment), et sur son petit voilier vient rejoindre la France. David et Lou trouveront des dizaines d’années plus tard son voilier… Tout ça fait froid dans le dos et semble très réaliste. Hâte de lire les romans suivants !