DELORME©EricDessons
 
 
Chris Kraus
traduit de l'allemand par Rose Labourie
Belfond
août 2019
887 p.  24,90 €
ebook avec DRM 16,99 €
 
 
 

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Marie-Laure Delorme (Le JDD) a choisi « La fabrique des salauds » de Chris Kraus (Belfond)

« On ne peut pas comprendre ce roman si l’on n’a pas quelques éléments biographiques sur Chris Kraus. Ce réalisateur et romancier vient d’une famille germano-balte, dont certains membres avaient fait partie des escadrons de la mort qui avaient liquidé par balles des juifs lors de l’offensive contre l’URSS de 1941. A partir de là, il a voulu comprendre comment on devient un « parfait » nazi, un « bon » nazi. Il a mis dix ans pour réunir la documentation et écrire ce livre, dont l’intrigue tourne autour de trois personnages : deux frères, Koja et Hub, et une sœur Ev, qui a été adoptée alors qu’elle avait neuf ans. Elle a des origines juives qui ont été maintenues secrètes. Entre ces trois personnages se joue un trio amoureux, puisque Ev sera la maîtresse, puis la femme des deux frères. Koja était destiné à devenir un artiste, Hub un pasteur. Mais tous deux feront une carrière fulgurante dans la SS : Koja par cynisme et lâcheté, Hub par idéalisme et foi dans le nazisme. On suit ces trois personnages pendant la guerre et après.

Toute cette histoire est racontée en 1974 par le narrateur, Koja, à son voisin de chambre d’hôpital, un hippie. Koja est hospitalisé car il a une balle dans la tête.

Le livre a fait polémique en Allemagne pour deux raisons. La première, parce qu’une grosse partie du roman se passe après la guerre et montre le lien de continuité entre le nazisme et la RFA. La deuxième, parce que Koja, le narrateur, est trop séduisant. Il raconte qu’il a fait carrière dans la SS par amour, il ne cesse de nous mentir et de se mentir. S’il est normal qu’il nous donne sa version, il ne faut en revanche jamais, au cours de cette lecture, oublier le titre. Et à aucun moment Kris Kraus ne raconte autre chose que cette « fabrique des salauds ». »

Propos recueillis par Pascale Frey
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