Avec « Standard », Nina Bouraoui change de registre et décrit les rouages de la médiocre vie d’un raté ordinaire. Bruno Kerjen a la trentaine. Breton d’origine, il s’est exilé à Paris, où il exerce un métier d’ouvrier en électronique en dessous de ses compétences chez Supélec, une entreprise qui subit de plein fouet la crise financière. Célibataire endurci, il refuse toute relation amicale ou amoureuse et sa vie s’organise entre ce travail de plus en plus stressant et son domicile de Vitry sur Seine, où il remplit son temps libre de « junk food » et de fantasmes sexuels téléphoniques. Le décès de son père, la solitude de sa mère et sa seule amitié avec un camarade de lycée, Gilles, aussi paumé que lui, le ramènent parfois dans sa Bretagne natale. C’est là qu’un jour, cette existence terne et solitaire va basculer. Bruno va recroiser Marylène, la seule qui, à l’époque du lycée, avait suscité chez lui un semblant d’émotion. Revenue d’un exil en quête de rêves de grandeur, la belle va réveiller le feu chez cet anti-héros trop longtemps engourdi. Cette histoire peut paraître glauque. Elle l’est, d’une certaine façon. Mais à travers ce portrait psychologique d’un « loser » attachant, Nina Bouraoui passe au scalpel une époque faite de laisser-allers individuels et collectifs, et nous met face à la question essentielle du sens de nos destins. Qu’est-ce que réussir sa vie ? Jusqu’où peut-on se résigner ? Doit-on oublier nos rêves de jeunesse pour cadenasser nos existences dans le précaire confort de chemins qui semblent « rassurants »? Avec « Standard », Nina Bouraoui signe l’un de ses meilleurs romans.