Persona
Maxime Girardeau

Mazarine
février 2020
424 p.  19 €
 
 
 
 La rédaction l'a lu

Pire que morts

Avouons-le tout de go, c’est un premier roman qui aurait sans doute gagné à être resserré dans son démarrage, nettoyé de phrases à l’emporte-pièce, de lieux communs et autres pépites absconses. La mise en place des protagonistes de ce « Persona » donne peut-être un peu trop le ton. Tel Kahl qui enfile, en quelques paragraphes, le costume du type que le lecteur s’empressera de détester malgré quelques marottes sympas. Citons : la collection de masques primitifs, la gestuelle du chef cuistot surdoué (tel débiter en « un geste précis (…) une pomme, une carotte et une demi-betterave qui vaudrait à coup sûr admiration d’un jury à Top Chef) et… l’art de gonfler le torse « à l’unisson de ses compatriotes du monde entier ».

L’essentiel est heureusement ailleurs. Un scénario qui fonctionne plutôt bien et des rebondissements -et une fin- dignes du meilleur de Jean-Christophe Grangé. Les scènes qui ont pour cadre le milieu des GAFAM (Google, Apple, Facebook, Amazon, Microsoft) sont très réalistes et offrent des respirations bienvenues entre deux descriptions de corps ultra-torturés, de quasi morts-vivants. L’enquêteur en chef, Franck Somerset, « laboratoire d’incubation de la police criminelle » (non non, pas à lui tout seul) s’adjoint les services de personnes non issues du sérail qui rappellent qu’en matière d’enquête policière comme dans la vie quotidienne, les algorithmes sont partout. Les données partagées sur internet sont une manne pour qui sait les utiliser et l’auteur, ex-spécialiste du marketing digital sait de quoi il parle. Trouver un mobile et un point commun à ces victimes vire à l’obsession pour Franck Somerset, qui piétine. L’aide de plus en plus justifiée d’Elga (travaillant pour Google), d’Ariane (mathématicienne spécialiste d’intelligence artificielle) et de Yann (analyste militaire) permettent à l’équipe de la Crim’ de progresser dans leur enquête. Après bien des péripéties, et une (re)découverte de lieux parisiens loin des canons touristiques habituels, la figure criminelle imaginée par Maxime Girardeau sera, au final, bien difficile à…détester ou, simplement, condamner.

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