Quelque part en Irlande vit un étrange berger. Car l’homme est bien plus qu’un gardien de moutons. Chacun d’entre eux a son « caractère », sa « singularité ». On ne sait pas si le berger les a inventés, fabriqués de toutes pièces ou s’il les a acquis. En tous cas, son cheptel est surprenant ; un mouton compliqué avec des manivelles et des boutons poussoirs, un mouton petit-déjeuner qui sert de grille-pain, un mouton mérinos tout doux 10% cachemire et son aiguille à tricoter, un mouton des mille et une nuits chargé d’histoires, un mouton enveloupé mi-mouton mi-loup et bien d’autres…
Si le berger maîtrise son métier, il angoisse beaucoup. Il les aime si fort, ses créatures, qu’il a toujours peur d’en perdre une. Il vit dans une inquiétude permanente. Ses moutons ne sont pas à l’abri d’une maladie, d’un loup féroce ou d’une violente tempête.
Impossible d’atteindre le bonheur ainsi. Alors un jour, courageusement, il se décide à vendre ses moutons. Comme il a toujours aimé les bateaux, il en achète un et devient pêcheur.
Aujourd’hui l’homme est heureux, libéré de sa peur, car même s’il ne connait pas entièrement son nouveau métier, il se sent bien sur les flots et apprivoise même ce vent qu’il redoutait tant avant : « Parce qu’à chaque fois que, de la mer, il regardait sa maison dressée sur la falaise, il comprenait que ce qui nous rend heureux n’est pas forcément ce que l’on sait faire le mieux. »
L’utilisation du noir et du blanc nuancés par le gris est très réussi, comme les détails foisonnants tour à tour drôles, fantastiques, absurdes et émouvants. La finesse du trait rejoint celle du texte. Des mots simples qui en disent long pour délivrer un bien joli message et entraîner un questionnement.
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