Le succès ne lui a pas fait tourner la tête. Victoria Hislop est chaleureuse, disponible, sympathique. Elle s’est fait connaître avec « L’île des oubliés » il y a deux ans. Puis elle a publié « Le fil des souvenirs », et la voici aujourd’hui avec un troisième roman, « Une dernière danse », qui a pour toile de fond la guerre d’Espagne. Elle aime (et sait) mêler romanesque et Histoire, à l’image de celui qui fut son professeur à Oxford, William Boyd.
Comment ou pourquoi êtes-vous devenue romancière ?
A 23 ans, mon premier enfant est né, Emily, puis trois ans plus tard le deuxième, William. J’avais des journées de folie, puisque je travaillais alors dans la publicité. Lorsque je suis retournée au bureau, après mon congé maternité, j’ai décidé que cela ne pouvait plus continuer comme ça. Mon mari était et est journaliste, et moi je me suis mise à écrire également, pour des journaux, des sujets sur les enfants, sur l’éducation.
Comment êtes-vous passée ensuite du journalisme à la fiction ?
Nous avons passé des vacances en Crête. Là-bas, un guide nous a expliqué que cette petite île que nous apercevions, Spinalonga, avait longtemps été réservée aux lépreux. J’ai convaincu ma famille d’aller la visiter. Je pensais en rapporter un article, mais cet endroit a réveillé mon imagination. Le soir même, j’ai commencé à noter sur une enveloppe, le seul papier que j’avais à disposition, les thèmes, les personnages de ce qui deviendra « L’île aux oubliés ». De retour à Londres, j’ai écrit un synopsis, j’ai fait des recherches sur la lèpre, et au bout de trois ans, je l’avais terminé.
Avez-vous trouvé facilement un éditeur ?
Pas du tout, même si j’étais sûre de moi. Une histoire de lépreux, ce n’est pas très tentant. Et puis j’ai rencontré une éditrice, dont le père avait été médecin en Afrique, et qui était plus ouverte que les autres. On a fait un premier tirage de 15.000 exemplaires, et le roman a fini par devenir un best-seller. Aujourd’hui, j’ai acheté une maison en Crète, je parle grec, j’ai plein d’amis là-bas et j’y vais presque chaque mois.
Après la Grèce, l’Espagne. Encore une histoire de vacances ?!
Non, de travail! Le Sunday Telegraph m’a commandé un article de voyage sur la salsa. Direction Grenade. Le matin je prenais des cours à l’école de danse, et l’après-midi, j’en profitais pour visiter la ville. Un guide, à nouveau, m’a montré la maison de Garcia Lorca. J’ai découvert son histoire, j’ignorais qu’il avait été assassiné, non pas parce qu’il était socialiste, mais parce qu’il était homosexuel. Il a disparu, et pendant longtemps on n’a pas su ce qu’il était devenu. Franco a gagné la guerre civile, il a été dictateur pendant trente-cinq ans, et c’est donc lui qui a écrit l’histoire de ce pays. Beaucoup de républicains ont croupi en prison jusqu’à en 1975. J’ai alors commencé à me plonger dans des livres sur la guerre civile et très vite, j’ai su que j’écrirais un roman sur cette période.
Avez-vous continué à étudier la salsa?
Je me suis surtout mise au flamenco, ce qui est beaucoup plus difficile. Je me suis même cassé le talon d’Achille et j’ai dû rester immobilisée pendant seize semaines. Cela m’a permis d’écrire mon roman.
Où nous embarquez-vous dans votre prochain livre ?
Chypre. C’est définitivement le soleil qui m’inspire. Ce sera une autre histoire de guerre civile, celle contre entre les Chypriotes et les Turcs…
Le pitch de La dernière danse
Deux amies d’enfance, deux Anglaises, décident de s’offrir quelques jours à Grenade. Maggie a bien l’intention de s’amuser, de danser jour et nuit. Sonia, de son côté, veut profiter de ces quelques jours loin d’un mari qui lui plombe sa vie. Au fil de ses promenades, elle entre par hasard dans un café, El Barril, et en discutant avec le patron, découvre tout un passé qu’elle ignorait. Celui d’un pays, l’Espagne, celui d’une famille, les Ramirez, et finalement le sien, ou plus précisément celui de sa mère, qu’elle a peu connue car elle est morte jeune.
Propos recueillis par Pascale Frey