Au bout de la route, l'enfer
C-J Box

traduit de l'anglais par Freddy Michalski
Points
septembre 2014
459 p.  7,90 €
 
 
 
 La rédaction l'a lu
on n'aurait pas dû

Un CJ Box pas très en forme

Charles James Box est, avec Craig Johnson, un des auteurs américains qui font souffler sur le roman policier l’air pur et frais des grands espaces. Son terrain de jeu à lui, ce sont les Rocheuses. A la suite de son héros le garde-chasse Joe Pickett, il explore avec une passion inconditionnelle ces régions peu habitées où seuls les animaux n’ont pas de fusil. Sous son Stetson, l’ancien journaliste établi dans le Wyoming échafaude des intrigues criminelles bien huilées, au style direct et efficace, sur fond de corruption et, bien entendu, d’atteintes à l’environnement.

Dans son abondante production, à raison d’un titre par an, CJ laisse parfois Joe et son cheval au repos. De petits écarts indispensables pour éviter la lassitude – la sienne comme celle des lecteurs – envers un personnage qui vit au rythme de la nature, plutôt à 20 à l’heure qu’à 100. Comme dans « Meurtres en bleu marine » (2008), légitimement couronné par un Edgar (l’Oscar du polar), ou dans « Trois semaines pour un adieu » et « Piégé dans le Yellowstone » (2011), premiers volets d’une trilogie autour d’un autre dur des montagnes, le sherif Cody Hoyt.

Avec « Au bout de la route, l’enfer », volet final de la série Hoyt, CJ Box ne se contente pas de forcer l’allure, il s’éloigne aussi de son registre habituel. Deux soeurs adolescentes s’égarent de nuit sur une route déserte du parc Yosemite. Danielle, 18 ans, a le permis de conduire et Gracie, 16 ans, a un cerveau. Cela leur suffira-t-il pour semer le routier pervers, tueur et violeur en série, qui les file à distance dans son semi-remorque géant à 18 vitesses? Sinon, qui pourra leur venir en aide, dans cette zone où un téléphone portable ne sert qu’à lester leur sac à main ?

On imagine ce qu’un réalisateur de film d’horreur même peu inspiré aurait fait de cet argument. CJ Box, lui, patine, trahi par une mécanique paresseuse et prévisible. La cohabitation des deux soeurs fâchées s’englue dans les clichés et le flic maudit Cody Hoyt se révèle caricatural et sans relief. Le convoi n’évite l’ornière que par la grâce d’une enquêtrice adjointe pétrie de doutes et de complexes, donc attachante. En donnant le beau rôle à Cassie, l’auteur parvient à relancer l’intérêt sans toutefois gommer totalement la déception. Pour se consoler de ce roman mineur, les fans de CJ Box patienteront jusqu’à la sortie, fin octobre, de « Force majeure » (aux éditions Calmann Lévy), douzième opus de la série Joe Pickett.

partagez cette critique
partage par email