L’improbable librairie
illustration Brigitte Lannaud Levy
Quoi de plus improbable, qu’une librairie au milieu des champs ? Puisqu’en milieu rural le monde culturel vient très rarement à vous, Xavier Gaillon s’est imaginé venir à lui en créant en 2009 ce lieu singulier de rencontres et d’échanges où se croisent plusieurs disciplines artistiques: ateliers créatifs, théâtre, concerts, expositions d’arts plastiques et librairie. C’est dans le garage d’un hameau de douze habitants en pleine campagne que cet instituteur a créé cet endroit chaleureux, l’un des espaces culturels les plus dynamiques de la Vienne et du Poitou. Leur calendrier d’animation est rempli pour les six mois à venir. Totalement improbable, mais pas irréalisable, ce projet fou a vu le jour sous forme d’association et fonctionne aujourd’hui avec une dizaine de bénévoles et de jeunes en service civique. Ici règne un esprit d’échange et d’ouverture aux autres, en atteste son site internet où la librairie est présentée, non sans humour, par une vidéo sans le son puisqu’exprimée en langage des signes… Ici rien n’est improbable.
Quel roman français nous conseillez-vous de lire ?
Un roman sorti en octobre dernier, « De terre et de mer » de Sophie Van der Linden (Buchet Chastel). Une histoire poétique autour de la mer et des îles. Celle d’un jeune artiste venu retrouver pour vingt-quatre heures une femme qui s’est détournée de lui.
Et du côté de la littérature étrangère ?
« Watership down » du récemment disparu Richard Adams (Monsieur Toussaint Louverture). Ce livre est sorti dans les années soixante-dix et a été un immense best-seller dans les pays anglo-saxons. Paradoxalement il est peu connu en France, où il vient d’être réédité. C’est une irrésistible et addictive fable politique façon « Game of thrones » dans laquelle les personnages sont des lapins de Garenne. C’est extraordinairement bien écrit et on dévore ces 500 pages d’une traite.
Quel premier roman vous a particulièrement marqué ?
J’ai envie de vous parler d’un album jeunesse : « Bou et les trois zours » de Elsa Valentin et Ilya Green (Atelier du poisson soluble). Elles revisitent avec beaucoup de poésie graphique « Boucle d’or et les trois ours » en se jouant de la langue et des sonorités. Un livre à déclamer à voix haute, dans une langue inventée et qui pourtant nous semble familière.
Quel est le roman le plus emblématique de la librairie que vous défendez avec ferveur ?
« Les demeurées » de Jeanne Benameur (Folio). L’histoire fusionnelle, passionnelle et silencieuse entre une femme idiote du village et sa fille qu’elle a conçue avec un ivrogne de passage. L’enfant grandissant, l’école souhaite rompre l’ignorance qui la menace en la séparant de sa mère. Un texte coup de poing sur les enfants qui sont dans le refus d’apprendre. Un livre que l’on défend ici avec passion.
Une brève de librairie
À force de faire des concerts, on est référencé comme salle de spectacle et c’est ainsi que le grand orchestre du Rajasthan nous a approchés. Or, compte-tenu de la taille du lieu, il aurait été impossible d’accueillir les quinze musiciens et trente danseurs. Ou tout du moins nous n’aurions pas pu mettre le public face à eux. Ça nous a bien fait rire.
Propos recueillis par Brigitte Lannaud Levy
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