Librairie Landru (Chamonix)
illustration Brigitte Lannaud Levy (Dr.)
Landru. Avec un tel nom et une équipe composée de femmes libraires, difficile pour elles d’échapper aux remarques amusées des clients en référence à Henri Désiré Landru, le célèbre Barbe-Bleue français. « On a l’habitude de répondre en riant qu’on l’attend toujours et de pied ferme », nous explique avec humour Pascale Farges, libraire depuis 15 ans dans cette institution de la célèbre station au pied du Mont-Blanc. Créée par les époux Landru il y a 86 ans, ce sont leurs petits-fils, guides de haute montagne qui en sont toujours les gérants aujourd’hui. L’enseigne a volontairement préservé son côté un peu désuet, et cela contribue au charme du lieu où le temps et les modes semblent n’avoir aucune prise. Les lecteurs s’y sentent bien et certains viennent même de Suisse en voisins pour se faire conseiller leurs ouvrages. Pour Pascale Farges qui nous reçoit aujourd’hui, ce qui caractérise le mieux la librairie Landru, c’est la grande fidélité aux auteurs et aux lecteurs. Un rapport amical et complice qui s’est tissé au fil des saisons tant avec les habitants à l’année qu’avec les résidents secondaires ou simples vacanciers de passage. C’est elle qui nous livre les bons conseils de lecture de cette semaine qui pour beaucoup est une semaine de vacances à la montagne.
Quel roman nous recommandez-vous de lire ?
« Né d’aucune femme » de Franck Bouysse (La Manufacture des livres). Je viens de le terminer. L’écriture est exceptionnelle et sa beauté vient atténuer la dureté du sujet. C’est l’histoire au cœur d’une France rurale très pauvre, d’un père qui vend sa fille. Poignant et magistral.
Et du côté des auteurs étrangers ?
« Céline » de Peter Heller (Actes Sud) J’aime cet auteur américain plus particulièrement pour son écriture. Ce roman est une sorte de « Nature Writing » sur les routes du Grand Ouest américain. L’histoire d’une jeune femme qui engage une artiste détective privée pour retrouver son père disparu. C’est un beau roman d’aventure, d’humour et d’amour sur fond de grands espaces.
Y a-t-il un premier roman qui vous a particulièrement marqué ?
Il n’est pas nouveau, mais c’est un premier et ultime roman d’un auteur grec né en 1930 Nìkos Kokàntzis : « Gioconda » (L’Aube). Il a écrit cet unique texte, retrouvé deux ans après sa mort. Il y raconte son amour pour une jeune fille juive déportée et tuée à Auschwitz. Ainsi voulait-il la garder en mémoire, vivante et qu’on ne la tue pas une deuxième fois en l’oubliant. C’est tout simplement magnifique.
Quel livre vous êtes-vous promis de lire ?
Je suis tellement et depuis toujours si boulimique de lectures, que j’ai au moins 30 livres en attente à la maison que je me suis promis de lire.
Quel est le livre le plus emblématique de la librairie que vous défendez depuis toujours avec ferveur ?
Un grand classique de la maison qui est un grand classique tout court, c’est « Premier de cordée » de Roger Frison-Roche. Nous le proposons et le vendons sous toutes ses formes (BD, illustré, pour enfants…) ainsi que les deux autres ouvrages qui suivent et forment la trilogie : « La grand crevasse » et « Retour à la montagne ».
Une brève de librairie :
Partie avec mon mari à Berlin pour des raisons familiales, j’assiste là-bas à une rencontre passionnante avec la journaliste, franco-germanique, Géraldine Schwarz qui a écrit un livre essentiel sur le devoir de mémoire « Les amnésiques » (Flammarion). Deux mois plus tard, une jeune femme vient à la librairie et me demande de la conseiller. Tout à coup, je reconnais Géraldine Schwarz que j’admire tant, ici même à Chamonix alors qu’elle vit à Berlin. Et incroyable elle là, à la librairie. Cela a été un grand moment d’émotion pour toutes les deux. Et quel heureux hasard ou merveilleuse coïncidence. On s’est promis de ne pas en rester là et d’organiser une conférence d’ici peu à la librairie.
Propos recueillis par Brigitte Lannaud Levy
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Librairie Landru
74 rue Joseph Vallot
74400 Chamonix-Mont-Blanc