Sculpter est une chose – écrire en est une autre. Mais Valérie Rossignol réussit à faire les deux et nous le démontre dans son livre « De terre et de chair ».
Dans sa préface, Belinda Cannone écrit : « Voici un livre qui, faisant de nous ce lecteur pensif cher à Victor Hugo, nous incite souvent à lever la tête au fil des pages et à réfléchir à notre rapport au corps de l’autre en général, et à celui des femmes avec le corps des hommes en particulier. Écrit par une femme, il interroge le féminin à l’œuvre. Valérie Rossignol restitue ici une double expérience, celle de la sculpture et celle de l’amour, qui se déploient dans une suspension du temps. » Et cette préface est tellement complète qu’elle aurait pu être utilisée en guise de chronique. Mais il faut tout de même que je donne mon ressenti de cette lecture pour laquelle j’ai entendu deux grands cris : celui de l’amour de la terre et celui de la chair.
Devant elle, l’homme nu se dévoile : « on ne peut pas tricher. ».
Valérie nous prouve ses deux talents avec ce livre qui compte deux chapitres principaux :
* Homme de terre,
* Homme de chair.
* Dans le premier, elle nous explique tout le processus du travail de cette terre pour modeler le corps. Elle nous raconte tout en tant que femme et artiste. Avec ses mains, elle façonne une sculpture tandis que la terre et l’écriture fusionnent.
Pour Valérie Rossignol, son histoire d’hommes sculptés est une visite dans l’infiniment petit qui nous habite – c’est l’histoire du vivant.
Elle reconnaît que « il aura fallu des mois de travail pour que mon œil intègre les lois de l’anatomie humaine tant nous déformons ce que nous voyons. »
Alors que venait d’être commis le terrible attentat du Bataclan, Valérie écrit : « J’ai créé un homme alors que des attentats venaient d’être commis à Paris. Le rendez-vous était pris. J’ai créé un homme de terre pendant qu’un homme de chair mourait. » Pour la sculptrice, à partir du moment où le travail de la terre débute, le modèle devient autre. » Il prend part à ce travail en adhérant et en aidant à la réalisation du projet.
* Vient ensuite le second chapitre qui est une longue lettre d’amour. Pour la jeune femme qui écrit cet appel, l’homme est un être impulsif : pulsion sexuelle et violence.
Cet amour ne va qu’en s’amplifiant au fil des pages – il n’y a plus de limites…
Valérie Rossignol termine sur ces lignes : « Nous ferons alors l’histoire à l’envers, nous la réécrirons, déroulant le fil pour remonter à la source car nos vies sont d’inspiration partagée. (…) Je termine sur ces mots. Garde-les précieusement et ne m’en dis rien, s’il te plaît. (…) Les mots que tu viens de lire seront oubliés, transformés par ta mémoire. Ils auront subi l’érosion du temps intérieur. Le moment sera venu alors de me répondre. Amour. »
Quant à Henri-Paul Baudet qui a initié Valérie au modelage d’après un modèle vivant, il écrit : « Les mains de Valérie donnent naissance à une sculpture et à un texte où chaque médium emprunte à l’autre le vocabulaire émotionnel. La terre et l’écriture fusionnent dans la chair. »