De Françoise Dolto, on a lu beaucoup de choses. Sur Françoise Dolto, on en a lu encore davantage. Que restait-il à dire, à écrire, à découvrir ? Peut-être pas grand chose de nouveau, mais Caroline Eliacheff, psychanalyste et pédopsychiatre, qui a eu la chance de travailler avec elle, s’est étonnée de voir que trente ans après sa mort, son nom ne disait plus rien aux personnes nées dans les années 80 et 90, que son héritage (pourtant révolutionnaire) s’était évaporé. Pour cette piqûre de rappel bienvenue, Caroline Eliacheff a trouvé une astuce: raconter Dolto à travers une journée-type de 1979. Cette année-là, la psychanalyste a 71 ans, elle a arrêté depuis peu l’émission de radio qui l’a rendue célèbre et surtout accessible à toutes les familles. Grâce à France Inter, la psychanalyse s’est invitée chez des personnes qui n’auraient jamais eu l’idée de consulter. A ce moment où Caroline Eliacheff la cueille, Françoise Dolto a également arrêté sa consultation de Trousseau, et reçoit maintenant ses jeunes patients chez elle, dans le cinquième arrondissement, où elle vit avec son mari Boris, qui a cessé son activité de physiothérapeute. Cette « journée particulière » est donc prétexte à faire un point sur la carrière de Dolto à ce moment précis de sa vie mais aussi, grâce à des flash backs, sur son parcours, sur sa manière tout à fait révolutionnaire d’envisager l’enfance et les enfants. Caroline Eliacheff qui a assisté à des consultations raconte l’écoute extraordinaire dont elle était dotée, son attention particulière, sa perspicacité qui la reliaient directement à ses petits patients. Ce livre, véritable hommage, balaye aussi la reponsabilité qu’on lui a imputée d’avoir donné naissance à toute une génération d’enfants-rois. Ce n’est pas parce qu’on les écoute qu’on doit laisser les enfants devenir des dictateurs. Cet essai arrive à point nommé pour nous rappeler qu’il y a effectivement eu, comme le précise le bandeau sur le livre, un avant et un après Dolto. Il ne faudrait pas l’oublier.