Testament à l’anglaise, Bienvenue au club et Expo 58 sont quelques-uns des titres de l’un des auteurs britanniques les plus en vogue. Gallimard nous propose aujourd’hui un recueil de textes (conférences, interviews, articles) dans lesquels Jonathan Coe parle de lui, de son travail : exigeant, sensible, caustique, parfois un brin exaspérant… Mais qu’est-ce que c’est bien !
Que ce soit dans le domaine littéraire, musical ou cinématographique, notre auteur a toujours été à la recherche de l’inattendu. Ses références ? Laurence Sterne et Henry Fielding, deux inventeurs de la forme libre du roman, liberté que le diplômé de Cambridge retrouve aussi chez des auteurs éclectiques comme Flann O’Brien ou B.S. Johnson, qu’il compare aux « Monty Python » dont il est aussi fan : tous des fantaisistes qui renouvellent le comique par la voie du burlesque. Plus surprenant, son coup de foudre en 1982 (il a alors 21 ans) pour les auteures anglaises de la collection « Virago Modern Classics » (ça ne s’invente pas !), reléguées au second plan pour un public féminin qui s’ennuie en attendant son thé de cinq heures. Quant à ses contemporains, il tranche dans le vif, admire sans réserve Kazuo Ishiguro et entasse dans le même panier la génération qui le précède, celle des Martin Amis, Ian McEwan et Julian Barnes, « trop lisses, trop urbains » à son goût… Jonathan Coe revendique ainsi son provincialisme, qu’il oppose à une écriture de la métropole, abhorrant du même coup ce qu’est devenue la capitale britannique, dont l’âme gît sous sa nouvelle architecture. Lui, pour écrire, il a besoin d’une chambre « avec vue », si possible luxueuse.
Emerge au fil des pages l’autoportrait intime d’un homme passionné de musique, qui voulait devenir pianiste de rock. A la question qu’il déteste et qu’on lui pose invariablement : « pourquoi écrivez-vous ? », il répond « parce que je suis malheureux quand je n’écris pas ». Pour preuve, son récit envoûtant de la genèse de La pluie, avant qu’elle tombe (une histoire de famille sur fond de campagne anglaise : un de mes préférés !), dont il fait une analyse tout en finesse. Celui que l’on réduit trop souvent à l’écrivain du contemporain désenchanté et satiriste des années Thatcher se révèle chercheur d’épiphanies et revendique l’héritage imaginaire de Tolkien. Etonnant, je vous disais.