La vie rêvée
Michel Galvin

Editions du Rouergue
octobre 2014
44 p.  16 €
 
 
 
 La rédaction l'a lu

Une pépite !

Voilà un album sous-marin épatant, tant par son histoire d’ours-poisson pleine de fantaisie et de questions que par ses magnifiques dessins occupant toutes les pages, épurés, volontairement déroutants.

Il devrait susciter quelques discussions lors de sa lecture entre parents et enfants. On sait bien qu’un adulte qui lit un livre à un enfant en regarde rarement les images, ce dernier y plongeant par contre tout entier, surtout s’il ne connaît pas encore les lettres. Or, dans « La vie rêvée », qui se déroule officiellement dans les montagnes de Subaguavalavida (!), Michel Galvin met en scène un héros qui est dit « ours » dans le texte mais apparaît sous les traits d’un petit poisson!

L’ours des montagnes. 
On découvre d’abord l' »ours des montagnes » dans son milieu, dedans, dehors ou entre les deux, mais toujours dans les fonds sous-marins qu’indiquent les algues et les autres habitants des lieux.
On le voit ensuite chasser son petit-déjeuner, en plusieurs services car il a fort bon appétit malgré sa taille réduite.
C’est quand l' »ours » mord la patte d’une autruche qu’il nomme « truite » que cet excellent album prend son envol.
Du haut de ses échasses, la victime ailée ose un doublement désarçonnant: « Que voulez-vous à une paisible truite? Vous vous prenez pour un ours ou quoi?! » Questions suivies d’explications, « Les vrais ours ont une queue touffue, deux oreilles sur la tête et vivent bien plus haut sur la montagne!!! », que clôture la premières des expressions un peu lestes qui ponctuent les épisodes. Pouvoir dire, puisque c’est écrit, « Espèce de niais » ou « Espèce de crétin » et des pires encore, quelle joie finalement.

Sardines, lapins ou ours ?
L’ouvrage se poursuit de plus en plus haut par la recherche d’un « vrai ours ». De page en page, le minuscule héros, un vrai ours ou un faux ours donc, fait d’autres rencontres de « poissons » qu’il interroge sur leur aptitude à être eux aussi des ours. Banc de sardines, gardon et saumon se présentent évidemment sous l’aspect d’animaux à poils, lapins, tamanoir, etc., et que l’enquêteur se contentera de dévorer avant de chercher encore plus loin, muni de nouvelles informations sur son investigation.
Malgré les apparences, on ne s’y perd jamais et on s’amuse beaucoup dans « Vie rêvée ».

De plus en plus haut sur la montagne.
Le rapport texte-images de l’album est extrêmement intelligent, terriblement drôle aussi, jusqu’à la finale qui achève cette histoire décalée par de nouvelles questions sur l’être et le paraître, le fond et la surface, la dévoration.
On retrouve également avec plaisir le style graphique minéral de Michel Galvin (« Le grand trou américain », « Rouergue, 2012, « Le vilo de Torticolo », Rouergue, 2013), qui donc, résiste fort bien à l’eau, ainsi que son art de jouer avec les mots et les expressions aimés des enfants pour en faire naître une histoire incroyable, aussi drôle que profonde, entre rêve et réalité.

Retrouvez Lucie Cauwe sur son blog

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coup de coeur

Pépite de l’album jeunesse de l’année

Il était une fois un poisson qui se prenait pour un ours – à moins que cet ours en était réellement un ? Il vivait dans les montagnes de Subaguavalavida – à moins que ce soit au fond de l’océan ? Fort affamé, notre poisson-ours se met en quête de nourriture fraîche. Il sort de sa grotte et chemine. Quelle chance, juste devant lui voici une belle truite – à moins que ce ne soit une autruche ? Gloups, il n’en fait qu’une bouchée. Plus loin, il aperçoit un banc de sardines – ou des lapins ? Miam, il les dévore toutes – ou tous. Alors qu’il entame son ascension vers les hauteurs – qui est peut-être la surface ? Il rencontre un magnifique gardon – ou bien un tamanoir ? Vite avalé…
Les animaux qu’il rencontre lui disent tous la même chose, avant qu’il ne les croque : mais pour qui il se prend, pour un ours ? Sait-il au moins ce qu’est un ours ?
Rassasié, le poisson-ours a besoin d’un petit somme… et là que voyons-nous ? Un ours qui se prélasse sur une grosse pierre et un poisson qui le regarde… GLOUPS !!! Mais, qui de l’ours ou du poisson a mangé l’autre ??
Un sublime album sur l’être et le paraître, la réalité et le rêve, la profondeur et la surface. En utilisant le non-sens, l’auteur amène une réflexion sur ce qui est, ce qu’on voit, ce qu’on croit, et comment les autres perçoivent les choses. Le décalage entre les mots et les images déstabilise l’enfant lors de la première lecture et les « pourquoi » fusent. J’ai vu cela avec ma fille (6 ans bientôt) : dans un premier temps, elle ne comprenait, était intriguée, elle a alors posé des questions, puis chemin faisant, elle a commencé à comprendre ce qui se déroulait sous ses yeux, puis elle a sourit et a éclaté de rire le livre refermé ! La rondeur des dessins, l’ épure, les petites taches de couleurs ici et là, quelques traits appuyés sont vraiment très beaux. Un doux mélange d’animal et de minéral.
Retrouvez Nadael sur son blog 

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