critique de "Chambre 2", dernier livre de Julie BONNIE - onlalu
   
 
 
 
 

Chambre 2
Julie BONNIE

Prix Fnac 2013
POCKET
août 2013
178 p.  6,50 €
ebook avec DRM 9,99 €
 
 
 
 Les internautes l'ont lu

Quand j’y pense, c’est dingue l’énergie que je déploie pour être lisse, transparente.

Un premier roman vraiment percutant, qui nous raconte Béatrice et son quotidien en maternité. Le « et » de liaison prend ici tout son sens, car à ce moment de sa vie Béatrice est dans un sacré creux, et ce qu’elle nous fait partager de sa vie « d’avant » a quelque chose d’un peu rebutant, dans un premier temps. Malgré soi, on désapprouve. Et on s’en veut de ce recul, on se secoue un peu, allez fais-moi donc preuve d’un peu d’ouverture, bon sang. On se dit aussi que la vision de la maternité est un poil orientée, ça passe très rapidement sur ce qui va bien pour ne voir que les problèmes, non ? Et puis il se passe quelque chose, Béatrice nous parle du docteur Marie, c’est la clef (en tout cas ça l’a été pour moi), notre regard change; et puis Béatrice nous parle de l’allaitement et ses mots portent, s’adressent à nos tripes qui les reconnaissent. Alors on termine le tout bouleversée, en empathie totale, et on se rend compte qu’en cent quatre-vingt six courtes pages tout un monde s’est déployé, et qu’on a peut-être bien soi-même récupéré une miette d’humanité qui nous faisait défaut.

partagez cette critique
partage par email
 
coup de coeur

Le cœur des femmes, le corps des femmes

Chambre 2 est un roman de femmes. En alternance, Béatrice rapporte ce qu’elle voit, ce qu’elle vit dans cette maternité où elle travaille faute d’autre chose, et revient sur sa propre histoire qui l’a menée jusque là.

Tellement de souffrance accompagne la naissance, consacrée moment de bonheur à un point tel qu’il est indécent d’oser aller mal. L’accouchée peut ressentir quelque douleur dans sa chair, mais sa félicité pleine et totale est l’assurance d’une âme sans fêlure ; tout juste lui accordera-t-on la grâce du baby-blues un peu plus tard, loin des regards et des appareils photos, sous réserve qu’il ne l’empêche pas de se reproduire encore. En France, le confort de l’équipe médicale passe bien souvent avant celui de la mère et du bébé (sinon, aucun accouchement ne se ferait sur le dos) – mais chut.

La naissance est Le Grand Secret. Les femmes qui sur tant de sujets se disent tout, les mères qui n’ont de meilleure ambition que de transmettre à leurs filles ce que la vie leur a enseigné, toutes aiment mieux enfermer la venue au monde dans le mystère d’une béatitude conséquence du bonheur conjugal. Il n’y a pas de raison que tu n’en passes pas par là toi aussi. Rejoins mon camp, ce territoire dont on ne revient pas. Et donne-moi des petits-enfants.
Parfois, bien sûr, les choses se passent bien, les êtres et la terre sont connectés, et cela réconcilie avec l’humanité toute entière.

Le parcours amoureux et physique de Béatrice est complexe mais rien n’est jamais définitif, et même à l’hôpital le mieux sécurisé, même à la vie la plus cadenassée il se trouve toujours une issue de secours.

Ce roman parle de la maternité, du corps, du désir, de l’amour, du sens de la vie.
Dans l’écriture de Julie Bonnie perce l’urgence – ou jaillit, plus encore que perce. Urgence de dire pour ne pas oublier, nécessité de consigner pour faire exister, urgence d’extérioriser pour sauver sa peau, dans un mélange de violence et de tendresse, de larmes et de sourires, de sang et de baisers.
Car c’est bien cela dont il s’agit. Sauver sa peau. Pour Béatrice, la narratrice, préservons le mystère. Mais il semble que Julie Bonnie, elle, y soit parvenue. En nous livrant un cri – un grand roman. Champagne.

Retrouvez Sophie  Adriansen sur son blog

partagez cette critique
partage par email
 

Prix Fnac 2013

Beaucoup de premiers romans sont proposés en cette rentrée, et c’est un premier roman qui reçoit le premier prix littéraire de la saison. Il y a une certaine logique dans cette affaire. Chambre 2, de Julie Bonnie, a déjà fait l’objet d’une présentation dans ce blog (la présentation de l’éditeur) mais je ne l’avais pas encore lu à ce moment et, depuis, les choses ont changé.
J’ai lu, j’ai plutôt aimé – pas à la folie, raisonnablement, comme on apprécie une cuisine où le chef a mis tout son savoir-faire et un peu de son âme.
Béatrice travaille dans une maternité, ce qui lui va bien et lui va mal. Côté positif, sa proximité avec les corps, en raison de son passé de danseuse nue avec un groupe de musique d’avant-garde. Côté négatif, l’accumulation des souffrances, les morceaux d’âmes qui s’échappent un peu partout dans les salles de travail ou même dans les chambres – quand il en reste un peu, de l’âme… Tout cela rendu avec une sensibilité un peu écorchée qui correspond parfaitement à l’esprit du roman.
Cette récompense est aussi une manière – involontaire, j’imagine – de saluer la présence de la littérature française dans une maison où elle peine à s’imposer malgré plusieurs tentatives louables. (Il faut dire que le secteur étranger y est particulièrement riche.) Sur les trois romans que proposait Juliette Joste, l’éditrice de ce domaine dans la rentrée, deux étaient sélectionnés parmi les quatre finalistes du prix Fnac du roman. De beaux débuts…
Retrouvez Pierre Maury sur son blog

partagez cette critique
partage par email