Laurie Colwin est morte en 1992, à quarante-huit ans, après avoir publié quatre romans, trois recueils de nouvelles, quelques essais sur la littérature anglo-saxonne et… des ouvrages de recettes. Il n’est donc pas injurieux de qualifier son livre de délicieux. A la fois léger et consistant, d’une douceur relevée d’une pointe d’amertume, cette histoire est le portrait sans concession et sans condamnation d’un couple adultère des années 80, Frank et Billy. Frank est marié à une femme élégante, décorative et décoratrice. Leurs deux enfants font des études, et tous les quatre vivent dans une maison cossue digne d’une revue. Billy est professeur, très amoureuse de son mari, et indifférente à toute esthétique. «Ma femme est méticuleuse, élégante et bien habillée, mais ma maîtresse, elle, affiche un négligé pratiquement sans limites. Je ne dois visiblement pas être le genre d’homme à avoir une maîtresse distinguée, de celles qu’on voit dans les films français…» constate Frank sans acrimonie.
Frank et Billy n’auraient jamais dû se rencontrer. Pourtant, ils se sont croisés au journal où ils collaborent, se sont revus et se sont aimés pendant plus de deux ans. Liaison harmonieuse pour Frank, qui réussit parfaitement à équilibrer ses journées et ses sentiments. Relation plus tumultueuse pour Billy, bourrelée de remords et mal à l’aise dans une double vie. Elle rompt. Deux ans plus tard, les anciens amants se retrouvent par hasard. Ils ne reprendront pas leur histoire là où elle s’est interrompue, bien que leurs sentiments n’aient pas changé. Mais il est rassurant de constater que, même aveuglés par la passion, ils ne se sont pas trompés l’un sur l’autre. Il s’agit bel et bien d’une pépite, comme le claironnent les éditions Autrement, et c’est donc avec joie que nous saluons leur initiative d’inaugurer cette nouvelle collection de poche avec une auteure suivie par un groupe de fans désespérés qu’elle se soit éteinte beaucoup trop jeune.