critique de "Immortelle randonnée: Compostelle malgré moi", dernier livre de Jean-Christophe Rufin - onlalu
   
 
 
 
 

Immortelle randonnée: Compostelle malgré moi
Jean-Christophe Rufin


Folio
avril 2013
288 p.  7,50 €
ebook avec DRM 13,90 €
 
 
 
 La rédaction l'a lu

En marche vers soi même

Il est médecin, écrivain à (grands) succès, académicien. Il fut même, un temps, ambassadeur de France au Sénégal. Autant dire que Jean-Christophe Rufin avait mille raisons et autant de prétextes de rester tranquillement assis dans son fauteuil: un prochain roman à terminer, une conférence à donner, une séance sous la coupole à ne pas manquer… Alors quelle mouche a bien pu le piquer le jour où il a décidé de se lancer dans cette « immortelle randonnée » et d’accomplir le pèlerinage de Saint-Jacques de Compostelle? Certes, il adore marcher. Il aime la montagne, il a escaladé pas mal de sommets et puis un jour, alors qu’il se trouvait à Paris, il est entré dans la petite boutique de la rue des Canettes, siège des Amis de Saint-Jacques. L’endroit n’était pas vraiment sexy, le permanencier pas vraiment réveillé, et pourtant, les dés étaient jetés, le virus attrapé, il partirait. Avec un art consommé du suspense et une bonne dose d’humour, l’écrivain nous raconte les grandes étapes de son périple. A plusieurs reprises il a été tenté de renoncer. Il a découvert la compétition entre les « Jacquet » et leur snobisme (des chemins sont plus prestigieux que d’autres), mais il a aussi découvert que ce pèlerinage n’avait plus grand chose à voir avec l’Eglise catholique. Nombreux sont les pélerins qui sont plus en quête d’eux même que de leur foi. Après ces huit cents kilomètres, Jean-Christophe Rufin s’est retrouvé délesté de quelques kilos, mais aussi de pas mal de contraintes. Il s’est allégé dans tous les sens du terme. Je ne sais pas si ce récit qui fourmille d’anecdotes vous expédiera sur le chemin à votre tour (il y a quand même des moments vraiment durs !), mais il a déjà séduit des milliers de lecteurs puisqu’il caracole en tête des ventes. Et puis un pèlerinage par procuration, ce n’est pas mal non plus!

L’ensemble des poches que nous avons chroniqués sont ici.

 

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 Les internautes l'ont lu
on n'aurait pas dû

Plutôt mortelle, sa randonnée!

Pour avoir fait moi-même le chemin de Compostelle, voici deux ans, je suis désolé, mais obligé de vous dire que la lecture du livre de Rufin m’a consterné. Tout d’abord, je me dis qu’avec ce récit, il peut berner, emporter même, pourquoi pas, les gens qui ne l’ont pas fait et qui rêvent de le faire, ce chemin.
Sa période clochard solitaire et crasseux, sa période mystique, tout ça peut peut-être donner à fantasmer.
Mais ce qui m’a le plus choqué, peut-être, c’est son mépris des gens, des pèlerins comme des autres.
Dans ce livre, dès qu’il rencontre un être humain, il nous le décrit comme mesquin, prétentieux, obsédé sexuel, sordide, incapable, voire lamentable.
Sa première rencontre, au siège des « Amis de St-Jacques » donne le ton. Et tout au long du livre, ça va être ainsi. Jusqu’à l’arrivée à Saint-Jacques, où un musicien joue de la cornemuse, « et en plus, il joue faux », comme il se plait à le rabâcher sur les ondes de sa promotion. Bien sûr, quand on fait partie de l’élite, le petit peuple est bien loin, en bas. Il en donne un superbe exemple, quand il nous raconte ce restaurant (probablement ouvrier, je ne me souviens plus !) où il a vu les convives pinçant les cuisses de la serveuse. Là, il a une merveilleuse expression, il nous parle à ce propos, d’amours « ancillaires ». Prend-il la serveuse pour une servante, puis, de là, pour une boniche ? Ou prend-il le lecteur pour un crétin ?
Ou alors, pourquoi pas, n’est ce qu’un trait de son humour ?
Ce n’est là qu’un exemple. Mais toutes ses rencontres ne visent qu’à dévaloriser l’autre. Il me semble qu’une seule « pèlerine » a trouvé grâce à ses yeux, une jeune fille charmante qu’un abruti draguait et qui, bien sûr, préférait marcher avec lui, en fait, le héros du livre.
Même dans sa période mystique, les curés ne sont pas à la hauteur. Même la Cantabrie, n’est pas non plus à la hauteur.
Quant à découper son livre en tranches «d’états d’âme» !!!, ça sent son procédé, mais, j’allais oublier, n’est pas académicien qui veut.
Le Chemin de Compostelle, c’est d’abord une aventure humaine, la rencontre avec le monde, avec la nature, avec l’autre, et avec soi-même.
Il semble que notre auteur n’y ait rencontré que l’image qu’il voulait voir de lui-même.
Je suis désolé de constater qu’à notre époque, l’esprit critique me semble avant tout au service de la marchandise, la médiatisation d’un auteur le plaçant au-dessus de la critique.
Marceldudu

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« J’ai soudain eu l’intuition que le Fataliste de Diderot ne s’appelait pas Jacques par hasard. »

Qu’apporte le récit de Jean-Christophe Rufin après celui d’Alix de Saint-André ? Plein de choses. Tous deux bien écrits (et c’est véritablement agréable de lire une belle langue bien précise sans jamais être prétentieuse), ils abordent les choses de manière totalement différente (ne serait-ce que parce qu’ils n’ont pas choisi le même itinéraire). Rufin, dans les premières pages, m’a inquiétée : il témoigne d’un humour qui n’augurait pas tellement bien. Mais le ton change au fil des pages, en même temps que sa perception des choses évolue; en cela, c’est très réussi, il adapte son style à ce qu’il a vécu intérieurement. Il réussit de très bons portraits et donne à ressentir ce qu’un tel périple peut provoquer (excellent chapitre « Dans l’alambic du chemin » 8 pages qui décrivent à merveille la catharsis), sans oublier le regard a posteriori, avec quelques temps de recul. Son récit se dévore !

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