Ce fut le fait divers le plus marquant des années 50 : Pauline Dubuisson, 24 ans, tua son jeune amant avant de tenter de mettre fin à ses jours. S’ensuivit un procès retentissant qui inspira le cinéaste Henri-Georges Clouzot. Il réalisa un film « La vérité », avec la somptueuse Bardot et dès lors, on n’imagina plus Pauline que sous les traits de la star. La vérité, la vraie, est toute autre. C’est ce que Jean-Luc Seigle, avec un réalisme effrayant, raconte à la première personne dans cet admirable roman.
Pauline est élevée dans une famille catholique. Pendant la seconde guerre mondiale, elle rencontre à 17 ans, poussée par son père colonel qui y voit un moyen de mieux vivre l’Occupation, un officier allemand. Ils entament une relation amoureuse. Il est jeune, il est beau. Elle est mûre, elle est libre, et ne voit rien de répréhensible dans cette liaison. D’autres, à la Libération, la puniront. Brutalement, sauvagement. Pauline sera tondue, violée, traumatisée. Bien sûr, lors de son procès, les juges ne verront en elle qu’une fille trop jolie pour être honnête, légère et sans morale qui couche avec l’ennemi. Elle est condamnée à perpétuité.
Jean-Luc Seigle parle d’une société d’après-guerre qui, heureusement, n’existe plus. Cette jeune femme coupable mais sacrifiée, courageuse et passionnée, aura tout perdu : sa jeunesse, son avenir, ses ambitions. À sa sortie de prison, elle part s’installer au Maroc, change de nom, espère un temps reconstruire sa vie. Car Pauline a foi en l’être humain. Mais les humains, eux, n’auront jamais foi en elle, ils ne pardonneront pas. C’est sans doute ce qui fait de cette histoire une tragédie plus grande encore.