Il y a presque quarante ans, ils jouaient ensemble au handball. Zac, Dylan, Kol, Rousseau, Hurel et Bob avaient alors plein d’illusions sur la vie en général et sur la leur en particulier. Ils seraient heureux, ils réussiraient. Mais lors de cette réunion d’anciens copains, c’est la colère qui domine. Contre les licenciements, le règne du fric, de la vulgarité et le conformisme libéral d’une société qui broie. Alors la petite bande, augmentée des femmes et des copines, a une idée totalement invraisemblable : enlever Pierre Ramut, l’homme au nœud papillon, éditorialiste vedette du très droitier « Valeurs Francaises. Il s’agit de lui faire partager la vie réelle des ouvriers, lui qui les dénigre tout au long de ses articles sans en avoir jamais vu un seul. La brigade du rire, comme se prénomme joyeusement l‘équipe, réussit son coup et enferme Ramut dans un bunker transformé en atelier, l’obligeant à percer des trous sur une machine selon ses préceptes, soit 48 heures par semaine, pour un SMIC diminué de 20 %, compétition des Chinois oblige …
Dans cette farce tragi-comique, on retrouve tout le souffle, l’énergie et la capacité d’indignation de l’auteur de « Vive la sociale ». Ses personnages sont formidables, criant d’authenticité en déçus du système au bout du rouleau, prêts à utiliser la violence pour se faire entendre. Mordillat dresse aussi le portrait de femmes, en grandes amoureuses. Dorith et Muriel, les fées jumelles libidineuses sont épatantes. Personne, évidemment, ne sortira indemne de l’opération. Le journaliste pompeux et sûr de lui retrouvera -t -il son poste, sa femme, ses certitudes sur la France d’en-bas ? Les joyeux lurons de la brigade prendront ils un nouveau départ, plus léger ? Dommage que le livre s’essouffle un peu en bout de course. Mais saluons néanmoins une comédie grinçante à souhait qui, sans jamais se prendre au sérieux, nous parle de justice sociale, mieux qu’un long discours.