Les éditions Albin Michel publient une nouvelle traduction (signée Alain Defossé) du premier roman d’Alan Hollinghurst, Booker Prize pour « La ligne de beauté » et Prix du Meilleur roman pour « L’enfant de l’étranger ». On y retrouve l’intérêt de l’auteur pour les intrigues minutieuses dévoilant les mœurs aristocratiques de la gentry londonienne. Si son univers est proche en cela de celui de Julian Fellowes, auteur et scénariste de « Downtown Abbey » et de « Passé imparfait », il s’agit ici d’un roman de jeunesse sensuel et explicite qui raconte par le menu les aventures sexuelles du très Oxfordien Lord Will Beckwith, un séduisant et dilettante aristocrate de 25 ans dans les années 80. Au détour de ses ébats dans les clubs de sport huppés ou dans l’ambiance moite des boîtes de nuit de Londres, Will sauvera d’un malaise Lord Charles Nantwick, un vieil aristocrate de 86 ans pris d’un malaise dans une de ces fameuses « pissotières » qui ont abrité bon nombre d’ébats de ce monde interlope. Pour le remercier, ce dernier l’invite bientôt à déjeuner et lui propose de lui confier ses journaux intimes, pour que Will écrive son histoire. A la lecture de cette vie passionnante, le jeune aristocrate note les parallèles entre sa vie et celle de Nantwick au même âge, pourtant à 60 ans de distance. Et il découvre que son propre grand-père aurait été responsable de l’emprisonnement de Nantwick pour « faits de mœurs » et suppose que, peut-être, le vieux Lord ne lui a pas confié par hasard ses récits intimes… L’intrigue de cet ouvrage, comme tous ceux de l’auteur, se déroule patiemment. Mais il est un témoignage intéressant sur la difficulté des errances homosexuelles du temps de la clandestinité, avant la libération sexuelle et le SIDA. Autant dire la préhistoire !