Cet ouvrage déconcertant se présente comme l’étude géographique de certaines îles, assorti d’un guide touristique. Mais voilà : l’auteur supposé du guide nous avertit, dès la préface, que ces îles sont innombrables – au sens propre : on n’en sait pas le nombre (des milliers ? des dizaines de milliers ?) ; qu’elles sont innommées – pour chaque nom il en existe au moins deux autres, dans différents patois locaux, et parfois des homonymes ; et non localisables – il n’existe d’ailleurs aucune carte de ce fameux Archipel. A propos, il s’appelle l’Archipel du Rêve. On comprend mieux cette incertitude fondamentale, ou, comme l’avertit l’auteur du guide : « il n’y a pourtant là rien de réel, la réalité appartenant à un autre domaine, plus évanescent ».
Bref, on nous propose de découvrir une cinquantaine de ces îles aux noms pittoresques. Description des paysages, du climat, informations sur les ressources, les musées, les plages… mais on est averti des horaires et trajets erratiques des ferries. Il semble d’ailleurs que personne ne quitte jamais son île natale. Les chroniques sont écrites dans des styles variés : reportage de journal, dépliant touristique, enquête policière, journal intime. Un fil rouge les traverse presque toutes, l’évocation de quelques personnages (une sociologue, un peintre, un écrivain, une artiste experte dans l’art de creuser dans les montagnes des tunnels sonores) que l’on retrouve d’une île à l’autre, vus sous différents aspects, ainsi qu’un meurtre inexpliqué.
Comme les rêves, cet Archipel est déroutant et fascinant.