Ils se retrouvent entre quatre murs. Les quatre murs de la maison, qu’ils viennent de vendre. Mais aussi les quatre murs de leurs existences, enfermés dans leurs souvenirs et dans les rôles attribués à chacun. Saul, Hélène, Rena et Elias sont frères et sœurs. Pour arbitrer les conflits qui les agitent, la mère a tendance à sortir les cartons rouges plus souvent pour certains que pour d’autres. Et le père enfin, décédé il y a quelques années, mais dont « l’absence les enveloppe comme une présence », continue à régner sur cette fratrie. On le sait depuis son premier roman, « Tout ira bien », Kéthévane Davrichewy est orfèvre dans l’art d’évoquer l’enfance, de disséquer les familles, de scruter les relations entre des gens qui s’aiment mais n’arrivent pas à l’exprimer. Une image: vous savez ce que l’on ressent lorsqu’un petit caillou s’est coincé dans votre chaussure ? Ce n’est pas grave, ni vraiment douloureux. Juste gênant. Quelque chose qui vous distrait, et vous empêche de profiter pleinement de votre journée. Et bien voilà ce que nous décrit Kéthévane: des gens qui ont tout, ou du moins beaucoup, pour être heureux. Et qui laissent la jalousie, l’amertume, les regrets les empoisonner. Chaque personnage a droit à son chapitre (à part les jumeaux, Rena et Elias qui en ont un pour deux), elle lève le voile peu à peu sur leur passé, va révéler le secret qui se trouve à l’origine du déséquilibre familial et nous permet de comprendre pourquoi tout est devenu si compliqué, si confus entre eux. C’est écrit au cordeau, pas un mot de trop. Avec une mention toute particulière pour les dialogues, excellents, qui sonnent toujours justes. Car non seulement on dévore ce roman, mais on l’écoute aussi.