« … L’histoire pourrait s’arrêter là. »
Et pourtant tel n’est pas le cas. Philippe Carrese a souhaité donner une suite à « Virtuoso ostinato » et quelle suite ! On y retrouve les principaux protagonistes dont la vie fait le fil conducteur du premier et du deuxième libre : Marzio, le fils de Volturno Belonore qui a tragiquement pris par tà la mort de Michele, le bellâtre musicien qui a violé Ofelia au soir d’un concert qui a mal tourné, mère de violetta, la fille qu’elle a eu trop tôt avec Marzio, raison pour laquelle Volturno l’a prise pour épouse, pour sauver l’honneur d’Ofelia ; Volturno bien entendu, devenu le patriarche du village malgré les déboires du premier épisode et chef local du pari de Mussolini ; Vittoria, la fille d’Ofelia.
Marzio, après un malheureux accident sur le bateau qui le ramène des Etas-Unis en Italie après une tournée au succès colossal, se range du violon qu’il revend et se met à jouer les Maestro en directeur d’orchestre.
Ofelia vit toujours aux Etats-Unis mais perd son mari et son fils dans un tragique accident de la route. Cet évèénement la poussera à se livrer un peu à sa fille Magda, à voyager à Marseille sur les traces d’une partie de son passé et à en repartir presque bredouille.
Mais « Retour à San Catello » nous réserve bien des surprises et de nouveaux personnages tout aussi importants que les historiques au premier rang desquels Tancredi Crevalcore, condottiere romain, malgré les nombreuses années passées, ne veut pas accepter l’idée de la mort de son fils Michele et lance un détective sur ses traces. Ce détective parviendra à déterrer le secret de la disparition de Michele et fournira à Tancredi toutes les raisons de se vengeance à venir : rayer les Belonore de la surface de la planète. Vient ensuite le personnage de Carlo : jeune photographe vivant à Marseille, il assassine un héritier d’une influente famille italienne ruinée par le péché mignon du rejeton à savoir le jeu, envoie par le fond un des truands chargé de s’assurer de la mort de Flavie, la sœur de Carlo, abandonnée aux mafieux par l’ignoble héritier désargenté pour couvrir une partie de ses dettes.
Philippe Carrese parvient une fois de plus, grâce à une écriture et un scénario d’une fluidité époustouflante, à nous replonger dans cette Italie fasciste où Mussolini n’a pas encore tout à fait achevé on rapprochement avec Hitler, à nous livrer une somptueuses saga familiale à travers le temps et l’espace en multipliant les scènes de son récit, en multipliant les personnages et les fils de son intrigue sans jamais perdre son lecteur en cours de route.
Philippe Carrese aime ses personnages, on sent qu’il ne peut pas les tuer impunément : c’est peut-être là sa seule faiblesse. Il ne peut se résoudre (pour l’instant) à faire mourir Marzio, Volturno ou Vittoria malgré les routes semées d’embûches et de dangers qu’il leur fait emprunter au fil des pages. Les personnages de Philippe Carrese ne sont pas tout noir ou tout blanc certes mais, afin de marquer les esprits, il n’emprunte pas non plus énormément de détours et oublie peut-être de temps en temps de mettre quelques touches de nuances dans leurs caractères.
Le roman de Philippe Carrese reste de facture très classique, n’est pas porteur d’un message philosophique mais Dieu que c’est bien fait, Dieu que ça glisse sous les yeux, Dieu qu’on aime à l’unisson de l’auteur la rudesse et la solidité de roc de Volturno, Dieu qu’on tombe sous le charme de la générosité et de la fraîcheur de Vittoria, Dieu qu’on s’emballe pour le destin de Carlo, Dieu qu’on s’enflamme pour Ofelia et sa fille Magda, de l’autre côté de l’océan, Dieu qu’on se prend d’amitié pour Marzio, emprunté dans ses contradictions.
« L’histoire ne peut pas s’arrêter là… » : il me tarde déjà d’avoir entre les mains le troisième livre de cette saga familiale !