La rédaction l'a lu
CET OUVRAGE FAIT PARTIE DE NOTRE SELECTION Desnos ressuscitéDe Desnos, on ne se souvient souvent que des quelques récitations à l’école. Il fut pourtant poète, écrivain, critique de cinéma, amoureux de la plus belle femme de Montparnasse, ami puis rival de Breton et résistant au nazisme. Mille vies que Gaëlle Nohant, l’inoubliable auteure de «La part des flammes» ressuscite en même temps que le mythique cabaret « Le Boeuf sur le toit », Kiki de Montparnasse, les années folles puis l’inquiétude de l’avant-guerre. On suit Desnos de la Coupole à la Rotonde, dans un Paris qui swingue et qui ose. Au fil des pages, on croise André Breton qui excommunie tous ceux qui ne sont pas assez surréalistes, Antonin Artaud, Anaïs Nin et Aragon. Autant de papillons de nuit qui forment une ronde endiablée. L’homme aux mille vies Extrêmement documenté, ce gros roman se dévore même si l’on ne connaît pas assez le poète, dont la romancière a eu la bonne idée d’insérer quelques vers lumineux dans le texte. Le 22 février 1944, l’homme au regard myope et au courage sans faille, est arrêté, déporté à Buchenwald puis succombe au typhus à Terezin, dans les bras d’un étudiant tchèque. Youki, son amante et son étoile noire en restera inconsolée. Comme nous après avoir découvert sous la plume habile et chatoyante de Gaëlle Nohant toutes les facettes de celui qui eut mille vies au cours d’un siècle incandescent.
Les internautes l'ont lu
coup de coeur
Juste sublime
C’est une biographie romancée qu’elle nous propose, celle du poète et résistant Robert Desnos, un homme aux mille vies épris de liberté. C’est une lecture exigeante, mon rythme de lecture était beaucoup plus lent qu’à l’habitude au début du livre mais c’était nécessaire je pense pour s’imprégner de l’époque, entrer dans l’ambiance et se glisser dans le sillage de Robert Desnos et éprouver le sentiment étrange de vivre avec lui sa vie, ses soirées folles dans Paris. J’ai vraiment eu le sentiment durant toute la lecture qu’il m’accompagnait, de sentir sa présence auprès de moi. Quelle vie les amis, ou plutôt devrais-je dire quelles vies incroyables car cette existence était tellement riche en contacts, en amitiés qu’on a le sentiment qu’il en a vécu plusieurs. On se plonge au coeur des années 20 jusqu’à la fin de l’occupation. Gaëlle Nohant nous plonge non seulement dans la vie de Robert mais aussi nous conte l’Histoire en majuscule, la situation mondiale, en Espagne, la crise économique, la montée du nationalisme, l’avènement d’Hitler, la guerre.. Avec Robert on va vivre des soirées folles dans Paris, on côtoie les précurseurs du surréalisme Breton, Crevel, Man Ray, Jeanson mais on participe aussi à des discussions intéressantes avec Prévert, Aragon, Rimbaud, Néruda, Eluard, Garcia Lorca, Picasso. On refait le monde au café des « Deux Magots »… On vit avec lui le processus de création, ses nouvelles, poésies, romans, théâtre… , toujours ce besoin d’écrire pour vivre, pour être libre. On vit les tensions avec Breton, sa rencontre avec Deharme qui l’amène à devenir animateur de radio, rédacteur puis chroniqueur dans un journal où la rencontre avec Laubreaux déterminera une partie de sa vie. Desnos c’est aussi le fêtard, l’amoureux. Deux femmes dans sa vie Yvonne George une célèbre chanteuse et celle qui sera l’Amour de sa vie, Youki Foujita, muse de Montparnasse, collectionneuse d’hommes mais qui au final découvrira l’amour véritable avec Robert. Des amis : Foujita, Jean-Louis Barrault, Frankel… J’ai appris énormément de choses sur cette période sur les personnalités artistiques célèbres qui faisaient partie de son quotidien. J’ai adoré ces découvertes. Et puis il y a l’autre facette de l’homme toujours généreux, rendant l’espoir et le sourire dans toutes les circonstances, quelle homme généreux qui prit parti durant l’occupation et devint résistant actif. Son engagement était total ne supportant pas l’occupation et étant trop épris de liberté. Peu à peu je suis rentrée dans le récit de sa vie, c’est passionnant, enrichissant. Je me suis attachée à lui et surtout à Youki qui grâce à lui a appris à aimer pleinement. Quel amour incroyable, véritable jusqu’à la fin de sa vie. Que d’émotions et de larmes versées je dois bien l’avouer à la fin du récit. La plume est magnifique, ponctuée de la poésie de Robert Desnos. Que de poésie, de passion et d’amour, un choix des mots justes, c’est juste splendide, envoûtant et lumineux. Je vous invite vivement à découvrir ce très beau coup de coeur. ♥♥♥♥♥ Les jolies phrases Pour lui, la vie ne saurait se limiter au jour. Il y a trop à faire, tant de musiciens à écouter, de vins à boire et d’amis à saluer ! Yvonne. Le y qui ouvre son prénom est le delta ondoyant qui l’aimante et le repousse. Yvonne est une étoile de mer. Pour l’aimer, il faut accepter d’être blessé. L’amour à sa naissance a la cruauté des bêtes sauvages c’est ainsi depuis la nuit des temps. Yvonne et Youki, les soeurs siamoises qui se partagent son coeur et qu’on ne peut détacher l’une de l’autre sans le déchirer. Robert n’entend pas limiter sa poésie à un seul support. Pour lui, l’écriture est ce territoire mouvant qui doit se réinventer sans cesse, demeurer une insurrection permanente, une fontaine de lave, des corps joints dans la danse ou l’amour, une voix qui descelle les pierres tombales et proclame que la mort n’existe pas, une expérience sensorielle. Robert avait rejoint les surréalistes car l’inconscient, le merveilleux et le rêve étaient son territoire de toujours, le seul dont il se sentait un arpenteur légitime. Robert, ce qui me terrifie le plus, c’est de vivre sans amour. Je sais que ce n’est pas un remède facile, qu’il peut être balayé au premier souffle… Mais sans amour rien n’a de sens, rien de nous retient, toutes les nuits se ressemblent. Les coeurs qui ont déjà été brisés redoutent l’amour parce qu’il porte sa fin. Ils craignent de ne pouvoir endurer ce coup supplémentaire, l’arrachement et la terre brûlée. Toute oeuvre d’art porte une vision du monde, observe Robert que cette discussion passionne même si les traducteurs peinent à en suivre le rythme. Les despotes entendent imposer la leur, et nous leur opposons une multiplicité de regards et de points de vue qui leur est odieuse. Pour eux, il ne peut y avoir qu’une seule vérité, qui devient un catéchisme. La culture est un enjeu. Quand on permet à ceux qui en sont exclus d’accéder à l’art et à la connaissance, on sème une graine de liberté qui peut les soustraire à la toute-puissance des tyrans. Il ne chasse plus les mots comme les papillons rares. Il veut que sa poésie sonne clair comme un chant de révolte, qu’elle s’alimente à un réel de chair et de sang. La poésie, le théâtre, la peinture et la musique peuvent triompher de la peur et de la haine, créer des ponts entre les hommes. -On ne peut dompter la nature qu’avec son consentement, répond Seghers avec un grand sourire. Tous les poètes le savent. Retrouvez Nathalie sur son blog
coup de coeur
Superbe évocation
Robert Desnos, j’ai retenu ce nom en bas des poésies que me récitaient mes enfants. Gaëlle Nohant a usé de ses propres mots pour faire vivre et revivre Robert Desnos avec grand talent. Cet homme fut fidèle, tout au long de sa vie, à ses sentiments, ses opinions, bref fidèle à lui-même. Une fourmi de dix-huit mètres « Cette fourmi de dix-huit mètres ne ressemble-t-elle pas à une locomotive, et son chapeau à un panache de fumée ? Dix-huit mètres, c’est la longueur précise d’une locomotive avec son tender à charbon. Et ces passagers de toutes les races parlant des langues différentes…. Robert Desnos est vivant sous la plume de Gaëlle Nohant, tellement généreux, grande gueule (comme je les aime), bagarreur, heureux de vivre, un brin provocateur… Un homme que l’on aimerait avoir pour ami, pour amant tant ce doit être bon de se frotter à sa chaleur, son humanité, sa générosité. J’ai vraiment eu l’agréable sensation de partager son univers, de l’accompagner, de le découvrir, un très beau voyage.
coup de coeur
L’éblouissante «légende d’un dormeur éveillé»
« Il n’y aura pas de connaissance véritable de Desnos tant qu’on n’en aura pas établi la légende. (il est bien entendu, en ce qui le concerne, que tout ce qui est légendaire est vrai) » Raymond Queneau, Revue Simoun Un mille-feuille. Je ne vois pas meilleure image que ce grand classique de la pâtisserie française pour décrire ce délicieux roman, si riche et si magnifiquement construit, offrant des couches successives de lecture pour nous régaler. Mais revenons à notre mille-feuille. La seconde couche, tout aussi riche et intense nous plonge au cœur de la création artistique avec une impressionnante liste d’artistes qui se côtoient, s’aiment avant de se détester cordialement, mais sentent combien ils sont complémentaires. De Montmartre on passe à Montparnasse et, nonobstant quelques excès, on essaie sans cesse d’explorer de nouveaux domaines. Ainsi « Robert n‘entend pas limiter sa poésie à un seul support. Pour lui, l’écriture est ce territoire mouvant qui doit se réinventer sans cesse, demeurer une insurrection permanente, une fontaine de lave, des corps joints dans la danse ou l’amour, une voix qui descelle les pierres tombales et proclame que la mort n’existe pas, une expérience sensorielle. » Les surréalistes sont alors au faîte de leur carrière. Un groupe qu’André Breton entend régenter, quitte à attaquer tous ceux qui n’entendent pas suivre le dogme qu’il a édicté. Pour l’auteur de Nadja, Robert « a renié le surréalisme, il s’est vendu à la presse bourgeoise, il a démenti les espoirs placés en lui et stagne désormais dans sa poésie rétrograde et ses alexandrins boiteux, par faiblesse de caractère et auto-complaisance. Pour faire bon poids, André a crû bon d’ajouter une anecdote pleine de sel qui dépeint Robert comme le poivrot de service. Et puis il y a cette phrase si blessante : « Depuis lors, Desnos, grandement desservi dans ce domaine par les puissances mêmes qui l’avaient quelque temps soulevé et dont il paraît ignorer encore qu’elles étaient des puissances de ténèbres, s’avisa malheureusement d’agir sur le plan réel où il n’était qu’un homme plus seul et plus pauvre qu’un autre, comme ceux qui ont vu, je dis : vu, ce que les autres craignent de voir et qui, plutôt qu’à vivre ce qui est, sont condamnés à vivre ce qui “fut” et ce qui “sera”. » La troisième couche du mille-feuille, celle qui nous dépeint l’histoire du monde, la montée des périls et cette guerre qui arrive peut à priori vous sembler indigeste. Rassurez-vous, il n’en est rien. Ce sont mêmes les plus belles pages du livre. Car nous sommes alors confrontés au combat essentiel, celui où l’on peut – on doit? – mourir pour des idées, celui où les sentiments sont transcendés par l’urgence, celui où la colère face à l’injustice vous remue corps et âme. « La poésie, le théâtre, la peinture et la musique peuvent triompher de la peur et de la haine, créer des ponts entre les hommes. Même si le temps presse, il est encore temps. Entre les couches de pâte feuilletée, notre mille-feuille tient grâce à la crème pâtissière, à l’écriture de Gaëlle Nohant. Au moins depuis La part des flammes, on sait avec quel talent elle parvient à dépeindre une atmosphère, à camper des personnages, à entraîner le lecteur dans une histoire. En suivant Robert Desnos, elle devient magicienne, parvient à nous hypnotiser et à nous transformer en dormeurs éveillés. Je prends le pari qu’en refermant cet extraordinaire roman vous serez tous devenus des inconditionnels de Robert Desnos et que vous aurez envie de (re)découvrir son œuvre dont les plus beaux vers parsèment le livre. Peut-être même voudrez-vous adhérer à l’association des Amis de Robert Desnos? Mais vous serez aussi devenus des inconditionnels de Gaëlle Nohant et irez courir chez votre libraire acheter ces deux autres romans disponibles en livre de poche. Retrouvez Henri-Charles Dahlem sur son blog. |
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