Denise Mina, 51 ans, écossaise de Glasgow, est venue à l’écriture alors qu’elle préparait une thèse de doctorat sur les violences féminines et enseignait la criminologie à l’université. Son début de parcours a déterminé sa patte d’écrivain: des personnages fouillés, des procédures sans faille. Elle est régulièrement nommée dans les palmarès et la BBC a déjà adapté deux de ses onze romans. Une reconnaissance qui se confirme avec le dernier, « De sang et de sel », déjà sélectionné pour les Gold Dagger, plus haute récompense du genre au Royaume-Uni. On y retrouve le personnage très attachant d’Alex Morrow, cousine de papier du sergent de la série télé « Happy Valley ». Cette inspectrice au caractère entier est sans cesse tiraillée entre sa mission et son équilibre familial, entre la mesquinerie de collègues sans pitié et l’ombre d’un chef de gang dont elle est la demi-soeur.
Cette cinquième enquête nous la ramène les nerfs à fleur de peau. Doit-elle clouer le bec à son chef bureaucrate et donneur de leçon ? Renouer avec son demi-frère alors qu’il est mourant ? Elle pense trouver les réponses, sinon chasser les interrogations, en s’immergant dans le travail. La voici sur la disparition d’une mère de bonne famille, espagnole aux accointances sud-américaines, dont le compagnon et les enfants semblent cacher des secrets. Comme d’ailleurs d’autres dans leur petite ville en bord de mer où tout le monde se connaît. Le meurtre auquel on assiste d’entrée, dans un lac à l’abri des regards, a-t-il un lien avec la disparue ? Morrow en est à relier les pointillés lorsque un cadavre refait surface.
Denise Mina pose avec soin les différentes intrigues qui vont se croiser, voire se rejoindre. Passé ce temps d’installation, tous les protagonistes nous apparaissent avec une incroyable netteté, cohérents dans leur moindre geste ou leur moindre parole. Les face à face sont intenses, l’atmosphère pesante. Des relations se révèlent, le mobile du meurtre initial s’esquisse. Le montage final est complexe et l’auteur laisse le lecteur démêler l’écheveau. Mieux vaut être attentif et perspicace. Et serrer les dents : cette romancière écorchée vive peut-elle se résoudre à une fin heureuse ?