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La cour des miracles de Jo NesboSi on ne le savait pas natif d’Oslo, on pourrait douter que Jo Nesbo est bien scandinave. Là où ses confrères suédois, islandais ou norvégiens cultivent une tradition de suspense psychologique ciselé, entre étude de moeurs et drame social, ses livres débordent d’excès en tout genre. La drogue y est abondante, la torture fréquente et la haine une seconde nature. Les truands sont sadiques, les policiers corrompus et les femmes intègres mais résignées. Pour apprécier les dix épisodes de la saga Harry Hole, de « L’homme chauve-souris » à « Police », mieux valait intégrer ces postulats de base . Sinon, autant lire ses écrits pour la jeunesse. Cela reste vrai avec « Le Fils », roman avec lequel il tourne la page sur son héros. Après sa mort dans « Fantôme » (2013), l’ombre de Harry Hole a continué de planer sur « Police » (2014). Ici, aucun protagoniste n’a vocation à durer. Celui qui donne son titre au livre a accepté, par dégoût de lui-même, d’endosser des crimes qu’il n’a pas commis. Parce qu’on lui a dit que son père était un policier véreux et qu’il l’a cru, il se laisse sombrer dans une prison de haute sécurité… où l’héroïne circule à volonté. Quand un co-détenu lui assure qu’il a été manipulé, il s’évade pour régler ses comptes. Dans sa croisade sanglante, le Fils croise deux anges gardiens qui vont lire le meilleur en lui : la jeune employée d’un centre pour drogués et un vieil inspecteur en quête d’un baroud d’honneur. Autour de ce trio lumineux, Jo Nesbo fait graviter une cour des miracles de tueurs, toxicos, fonctionnaires et entrepreneurs malhonnêtes. Au sommet de cette pyramide de crapules trône un colosse avide et féroce, auquel le fugitif va relier la mort de son père. L’échevau des complicités est complexe, serré, et la cavale rebondit de massacre en révélation, sans temps mort. Elle s’essouffle lors des rares moments d’intimité entre l’ange de la mort et sa belle. Mais après tout, ce n’est jamais dans la douceur que l’on attend Jo Nesbo.
Les internautes l'ont lu
coup de coeur
C’est noir, mais c’est bon !
J’aime bien quand un polar me happe au point de me rendre asociale pendant 48h. Quand le bien et le mal sont si étroitement mêlés qu’il est presque impossible de les dissocier. Quand l’auteur tire les ficelles avec tellement d’habileté que je n’ai qu’une envie : me laisser prendre, me laisser berner, me laisser balader. Je suis encore très novice en bibliographie de Jo Nesbo, j’aurais donc du mal à situer Le Fils par rapport à l’ensemble de son œuvre mais une chose est sûre : s’il n’est pas le meilleur, alors les autres sont des chefs-d’œuvre que je brûle de découvrir. Le Fils, c’est Sonny Lofthus, emprisonné depuis 12 ans dans l’une des prisons de haute sécurité de la région d’Oslo. Un gamin brillant qui a sombré lorsque son père, inspecteur de police s’est suicidé après avoir avoué être corrompu. Sa mère n’a pas tardé à suivre le même chemin et le jeune homme a trouvé du réconfort dans l’héroïne, puis dans un rôle de bouc-émissaire qui, en échange de sa dose quotidienne, lui fait endosser des crimes à la place des véritables meurtriers et purger leur peine. Une façon pour lui d’expier ceux de son père. Sa personnalité, son aura auprès des autres détenus lui valent une réputation quasi mystique, entre guérisseur et confesseur. Pourtant, ce bel équilibre va vaciller lorsque l’un des détenus lui révèle que son père n’était pas corrompu et qu’il a été assassiné par ceux qui avaient peur qu’il ne les démasque. Pour Sonny le choc suffit à lui donner la volonté de se sevrer puis de s’évader. Avec l’intention de retrouver les vrais coupables et de les faire payer. Côté industrie du crime, la chasse à l’homme est ouverte : Sonny connaît trop de secrets pour envisager de le laisser traîner dehors. Côté police, ce n’est pas mieux : lorsque l’évadé se transforme en tueur en série, tout est mis en œuvre pour tenter de limiter son action et l’empêcher de découvrir qui est la vraie taupe. Sonny pourra-t-il compter sur l’inspecteur Simon Kefas, l’ancien ami de son père ? Mais peut-il se permettre de faire confiance à un flic ? Policiers corrompus, crime organisé, trafics de drogue et d’êtres humains… La Norvège que donne à voir Jo Nesbo est loin des jolies images touristiques. Rien n’est jamais propre avec lui parce que la tentation est toujours plus forte et qu’un être humain reste ‘un être humain. « Il avait cru un jour être invincible, plus tard il s’était considéré comme une ordure. Il en était arrivé à la conclusion qu’il n’était ni l’un ni l’autre, juste un homme de chair et de sang, qui pouvait soit faire ce qui était bien soit se laisser guider par ses instincts les plus bas. Mais le libre arbitre existait-il seulement ? ». Sonny poursuit son parcours implacable, se jouant des policiers et des hommes de mains lancés à sa poursuite, semant les cadavres, faisant preuve de beaucoup de créativité dans l’art d’éliminer, tel un ange rédempteur. Et le lecteur n’a qu’une envie : qu’il les punisse tous ! Vengeance, rédemption, lutte entre le bien et le mal… On se régale. Chaque personnage, même le plus insignifiant dans l’histoire est une merveille de construction psychologique et contribue à alpaguer le lecteur. Aucun n’est exactement ce qu’il semble être. Jo Nesbo nous tient en haleine jusqu’à la fin et bien plus encore, par une ultime pirouette. Parce que le crime n’a jamais de fin (sinon, que deviendraient les écrivains de polars ?). En matière de polar, je crois qu’on a ici affaire à la crème de la crème. Je défie quiconque de le lâcher avant d’y être obligé (le corps ne suit pas, parfois il réclame du sommeil…). Parce qu’en plus d’être un bon polar, c’est un excellent roman. Retrouvez Nicole G. sur son blog |
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