Un thriller à la Harlan Coben chez Rivages ? Certains lecteurs de la première heure risquent d’écarquiller les yeux, habitués qu’ils sont à trouver plutôt sous cette bannière de grands noms du patrimoine littéraire policier. Pourtant, entre une fresque politico-historique de James Ellroy et un inédit de Donald Westlake à exhumer, cette maison pionnière semble vouloir renouer avec une vocation qu’elle avait fini par négliger : révéler des talents, surprendre son public. « Sécurité renforcée » de l’Américain Sean Doolittle, confirme cette ouverture à des auteurs en devenir, déjà amorcée avant le rachat par Actes Sud. Cet Américain natif du Nebraska, âgé de 44 ans, dont c’est le cinquième roman, plante dans une petite ville de l’Iowa – état où lui-même vit avec sa petite famille – un décor à la « American Beauty », ce film où Kevin Spacey oubliait son infortune conjugale en lorgnant une copine de sa fille… Un lotissement dans une banlieue résidentielle, un quadra bouclé par la police pour abus sur mineure… Le parallèle s’arrête là. Pas question ici de satire sociale ni de crise de la quarantaine. Très vite, l’auteur sème les indices d’une machination dans laquelle est piégé le personnage principal. Irruption de l’angoisse dans un quotidien bien réglé, sensation de ne plus être maître de son destin : c’est là où Doolittle rejoint Coben (auquel, d’ailleurs, l’éditeur fait ouvertement référence sur le bandeau promo du livre). Comme chez son modèle, l’intrigue flirte avec un thème sociétal : l’aspiration à la sécurité. Le héros réalise qu’en fait de tranquillité, le moindre mouvement dans son quartier est surveillé par un voisin tyrannique. Et que les accusations qui pèsent sur lui sont liées à cette paranoïa ambiante. Le style est alerte et efficace, le suspense tenu de bout en bout et les méchants très réussis : les fondamentaux d’un bon petit polar.