« Certaines choses ne peuvent pas être dites, seulement devinées. Elles doivent être comprises. Et vous comprenez, je crois, n’est-ce pas ? »
«American Elsewhere » faisait partie des trois premiers romans édités dans la collection Imaginaire chez Albin Michel. Si je l’avais lu au moment de sa sortie, j’aurais guetté avec plus d’avidité les futures parutions mais il n’est jamais trop tard, c’est (aussi) ce qui est bien avec les livres.
Autre part aux USA, donc, c’est Wink, petit bled tout droit sorti des clichés US des années cinquante et surtout, ne figurant sur aucune carte. Est-ce encore possible, de nos jours ? La preuve, si le bled en question a été construit il n’y a pas si longtemps autour d’un genre d’usine. En fait d’usine c’est plutôt le CERN, un laboratoire ultra-secret où on mène des recherches étonnantes. Désaffecté depuis quelques décennies, il occupe toujours le centre de cette étrange cité clin d’oeil. Déboule alors l’héroïne badass, la quarantaine fatiguée, orpheline depuis peu et ayant hérité d’une maison à Wink. Elle découvre en même temps que nous…
« Tout bon Texan, au fond de son coeur, est persuadé que n’importe quel problème peut être résolu par l’emploi d’une arme de gros calibre. »
Et des armes, il va y en avoir. Mais pas que.
« American Elsewhere » est un gros roman empli de mystères, le premier étant son irrésistible parfum envoûtant alors même que ses composants sont ultra basiques. Robert Jackson Bennett fait du neuf avec du vieux, il reprend les éléments de base du Fantastique et, loin de les détourner, il les décline avec régularité et (et c’est ce qui change tout) savoir-faire. Une certaine candeur, aussi. En tous les cas ça fonctionne aux petits oignons et on ne décroche ps, y compris dans les moments où la sauce est sacrément étirée (il faut le reconnaître aussi). Quelques longueurs, donc, un excès d’explications, mais une énorme qualité d’atmosphère, une ambiance excitante et oppressante qui en font un page-turner d’une redoutable efficacité. Dévoré !